Les femmes de Rilke
Publié le 30/11/2011
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Les Editions du Seuil continuent la publication de la Correspondance de Rainer Maria Rilke. Le troisième volume vient de paraître sous la direction de Philippe Jaccottet, dans la traduction à laquelle ont travaillé avec lui Blaise Briod et Pierre Klossovski. On mesure mieux ainsi l'importance de la correspondance du poète autrichien dont il existe quelque vingt mille lettres. Le besoin d'écrire, de s'adresser à quelqu'un par écrit, était fondamental chez cet homme. Il suffit de lire cette prose majestueuse, admirablement traduite dans un style qu'il n'aurait pas désavoué, avec ses complications de syntaxe et surtout cette nécessité de parler en images, d'user de métaphores attachées les unes aux autres, pour comprendre que le genre épistolaire dépassait dans son cas le seul bavardage. C'est à travers cette écriture postale qu'il tentait de se découvrir. La lettre était une espèce de miroir dans lequel il se regardait. Mais sa correspondance, comme on la lit, est surtout destinée aux femmes. Rilke avait besoin de confidentes, les unes devenant ses maîtresses, comme la belle Lou Andréas Salomé avec qui, à la fin du siècle, il fit un long voyage en Russie pour aller visiter Tolstoï, et une autre comme Clara Westhoff qui devint sa femme ; la passion arrètée, l'amitié restait. Et la faconde du poète à l'égard de celles qui avaient illuminé un moment son esprit restait intacte ; il lui fallait, à chaque heure, chaque jour, se raconter à elles. On pourrait dire se dévètir devant elles. Il inventait son oeuvre dans le discours qu'il leur tenait.
«
Kafka a su, mieux que quiconque, tracer l'image de
l'individu solitaire et faible dans un monde écra
sant et multiple.
Son roman l'Amérique met en
scène un certain Karl Rossmann, émigré aux Etats
Unis, qui ne comprend rien, malgré sa bonne
volonté, à l'esprit, aux lois, aux mœurs ou aux cou
tumes d'un pays totalement étranger à lui-mème
dans lequel, ne pouvant s'y insérer,
il devient enco
re une fois un réprouvé.
Mais on voit bien
à ces lectures, que les réprou
vés ne le sont en apparl!nce que par leur faute.
Ils
ignorent les règles.
S'ils les connaissaient, tous
leurs problèmes disparaîtraient.
Mais personne ne
les leur enseigne.
Ils sont condamnés, malgré tous
leurs efforts pour percer le mur de leur solitude, à
n'ètre que les témoins, puis les victimes, dans une
pièce dont ils n'ont mème pas appris le commence
ment de leur rôle.
Le cauchemar commence.
Le
cauchemar atteint
sa plus extraordinaire intensité
avec le Château où K.
encore tente, pour discuter
des affaires de son village, de joindre les personna
ges enfermés dans le château et qui font la loi.
Mais
rien de ce qu'il tente n'aboutit.
L'administration
veille, toute puissante et inactive.
K.
a l'impression
de se heurter à un univers chimérique, de se battre
contre des moulins.
Le héros; une fois encore, est
inexistant puisqu'on ne le connaît pas et que
le code grâce auquel il devrait s'intégrer aux autres ne
lui est pas révelé.
On a rarement décrit avec tant de
force l'acharnement de l'impuissance dans sa
confrontation insensée avec
la puissance.
La fable
est limpide.
Kafka raconte la lutte de l'homme avec
un ange invisible mais omniprésent.
Sous le
masque de cet ange noir, on peut mettre le pouvoir
des gouvernements,
la religion, la société, l'argent.
..
Chacun y trouve son compte.
Mais l'allégorie
compte peu.
C'est le sens du récit, cette manière de
refléter inlassablement les mèmes gestes, les mèmes
espoirs et les mèmes échecs d'un pauvre homme,
frère de Charlot, qui prennent le lecteur et lui font
reconnaître
sa propre image.
Le Japon dans le texte
Les œuvres capitales de la littérature japonaise : tel est le titre d'une collection qui commence à paraître
.aux Editions orientalistes de France, (Gal
limard) dans la traduction de René Sieffert.
Le tra
ducteur présente les textes en les situant dans leur
histoire et dans leur civilisation sans chercher à les
analyser de façon purement scientifique.
C'est
donc
au public curieux de l'univers nippon, et non
à des spécialistes, que s'adressent ces traductions
vives
où se révèle une société brillante, bouillon
nante et multiple que les estampes comme le
théâtre nô, comme le kabouki, traduisent aussi
avec d'autres moyens.
Le dit de Hagen, le dit de Heiji et le dit des Hei
ke, qui rempliss .ent deux épais volumes constituent
la chronique légendaire des luttes qui, au xn• siè
cle, opposèrent le clan des Taina et celui des Mina
moto.
Ici, on ne trouve que récits de combats,
assassinats, déportations de populations entières,
viols, massacres, misères et peur.
Ce sont les hor
reurs de la guerre, la laideur de l'humanité et sa beauté, sa souffrance et son courage.
Les récits,
destinés à ètre récités, sont écrits dans une prose
rythmée qui en permettait la mémorisation.
Pen dant des siècles, ils ont été la spécialité de chan
teurs, de moines, de mendiants ou d'aveugles qui
les transportaient d'une province à l'autre.
Les Journaux de voyage de Basho, écrivain du XVII• siècle, sont d'un autre ordre.
Un jour, Basho,
quittant le calme d'une retraite qui convenait à son
caractère, prit un bâton et un sac et s'en alla sur les
chemins.
Il visita tout le Japon, passant d'île en île,
de ville en ville, s'arrètant devant les paysages qui
mettaient son âme en fète ou lui révélaient
la puis
sance des dieux.
Il remplit plusieurs carnets de des
criptions et de pensées.
Lui aussi utilisait pour cela
une prose rythmée qui,
par instant, se transformait
en petits poèmes, les haïku, d'une expression popu
laire qui narguait les règles de la prosodie, mais
dont il fit un genre littéraire.
On voit encore dans
l'archipel nippon, sur des bornes, les textes de ces
poèmes que lui inspiraient les montagnes et les
fleuves, les arbres ou
la mer, les saisons qui passent
sur la nature.
Ce sont des monuments historiques
que l'urbanisation radicale du Japon remise désor
mais
à un coin de rue, entre deux immeubles.
On chercherait vainement alentour le moindre reflet
d'une description que les enfants apprennent à
l'école mais qui ne correspond plus
à rien..
»
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