Le Rouge et Le Noir Julien né manqua pas l'adjudication du bail.
Publié le 12/04/2014
Extrait du document
«
Le soir, on était assis en silence, autour du foyer domestique; le bruit du hêtre enflammé était la seule
distraction.
C'était un des moments de tristesse qui se rencontrent dans les familles les plus unies.
Un des
enfants s'écria joyeusement:
\24On sonne! on sonne!
\24Morbleu! si c'est M.
de Saint-Giraud qui vient me relancer sous prétexte de remerciement, s'écria le maire,
je lui dirai son fait, c'est trop fort.
C'est au Valenod qu'il en aura l'obligation, et c'est moi qui suis compromis.
Que dire, si ces maudits journaux jacobins vont s'emparer de cette anecdote, et faire de moi un M.
Nonante-cinq?
Un fort bel homme, aux gros favoris noirs, entrait en ce moment.
à la suite du domestique.
\24Monsieur le maire, je suis il signor Geronimo.
Voici une lettre que M.
le chevalier de Beauvaisis, attaché à
l'ambassade de Naples, m'a remise pour vous à mon départ; il n'y a que neuf jours, ajouta le signor Geronimo,
d'un air gai, en regardant Mme de Rênal.
Le signor de Beauvaisis, votre cousin, et mon bon ami, madame, dit
que vous savez l'italien.
La bonne humeur du Napolitain changea cette triste soirée en une soirée fort gaie.
Mme de Rênal voulut
absolument lui donner à souper.
Elle mit toute sa maison en mouvement; elle voulait à tout prix distraire
Julien de la qualification d'espion que, deux fois dans cette journée, il avait entendu retentir à son oreille.
Le
signor Geronimo était un chanteur célèbre, homme de bonne compagnie, et cependant fort gai, qualités qui, en
France, ne sont guère plus compatibles.
Il chanta après souper un petit duettino avec Mme de Rênal.
Il fit des
contes charmants.
A une heure du matin, les enfants se récrièrent, quand Julien leur proposa d'aller se coucher.
\24Encore cette histoire, dit l'aîné.
\24C'est la mienne, Signorino, reprit il signor Geronimo.
Il y a huit ans, j'étais comme vous un jeune élève du
conservatoire de Naples, j'entends j'avais votre âge; mais je n'avais pas l'honneur d'être le fils de l'illustre
maire de la jolie ville de Verrières.
Ce mot fit soupirer M.
de Rênal, il regarda sa femme.
Le signor Zingarelli, continua le jeune chanteur, outrant un peu son accent qui faisait pouffer de rire les
enfants, le signor Zingarelli était un maître excessivement sévère.
Il n'est pas aimé au conservatoire; mais il
veut qu'on agisse toujours comme si on l'aimait.
Je sortais le plus souvent que je pouvais; j'allais au petit
théâtre de San Carlino, où j'entendais une musique des dieux: mais, ô ciel! comment faire pour réunir les huit
sous que coûte l'entrée du parterre? Somme énorme, dit-il en regardant les enfants, et les enfants de rire.
Le
signor Giovannone, directeur de San Carlino, m'entendit chanter.
J'avais seize ans: a Cet enfant il est un
trésor", dit-il.
\24Veux-tu que je t'engage, mon cher ami? vint-il me dire.
\24Et combien me donnerez-vous?
\24Quarante ducats par mois.
Messieurs, c'est cent soixante francs.
Je crus voir les cieux ouverts.
\24Mais comment, dis-je à Giovannone, obtenir que le sévère Zingarelli me laisse sortir? Le Rouge et Le Noir
CHAPITRE XXIII.
CHAGRINS D'UN FONCTIONNAIRE 85.
»
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