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Le pardon d'Auguste. Cinna. Corneille. (Acte V, sc. III.)

Publié le 21/06/2011

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auguste

AUGUSTE En est-ce assez, ô ciel! et le sort, pour me nuire, A-t-il quelqu'un des miens qu'il veuille encor séduire? Qu'il joigne à ses efforts les secours des enfers; Je suis maître de moi comme de l'univers; Je le suis, je veux l'être. O siècles! ô mémoire! Conservez à jamais ma dernière victoire! Je triomphe aujourd'hui du plus juste courroux De qui le souvenir puisse aller jusqu'à vous. Soyons amis, Cinna, c'est moi qui t'en convie : Comme à mon ennemi je t'ai donné la vie : Et, malgré la fureur de ton lâche destin, Je te la donne encor comme à mon assassin. Commençons un combat qui montre par l'issue Qui l'aura mieux de nous ou donnée ou reçue. Tu trahis mes bienfaits, je les veux redoubler; Je t'en avais comblé, je t'en veux accabler. Avec cette beauté que je t'avais donnée, Reçois le consulat pour la prochaine année. Aime Cinna, ma fille, en cet illustre rang; Préfères-en la pourpre à celle de mon sang; Apprends sur mon exemple à vaincre ta colère : Te rendant un époux, je te rends plus qu'un père.

ÉMILIE Et je me rends, Seigneur, à ces hautes bontés; Je recouvre la vue auprès de leurs clartés : Je connais mon forfait, qui me semblait justice; Et, ce que n'avait pu la terreur du supplice, Je sens naître en mon âme un repentir puissant, Et mon coeur en secret me dit qu'il y consent.

Cinna et Maxime, à l'exemple d'Émilie, se prosternent devant Auguste.  Livie, sa femme, lui prédit que ce pardon généreux sera donné comme exemple à la postérité. Auguste répond :

J'en accepte l'augure, et j'ose l'espérer : Ainsi toujours les dieux vous daignent inspirer! Qu'on redouble demain les heureux sacrifices Que nous leur offrirons sous de meilleurs auspices; Et que vos conjurés entendent publier Qu'Auguste a tout appris, et veut tout oublier.

(Acte V, sc. III.)

QUESTIONS D'EXAMEN

I. — L'ensemble; — l'idée générale. — Nature du morceau : une scène de la tragédie de Cinna, connue sous le nom de scène du pardon. — Quelle en est l'idée générale? (Bien voir que le but du poète est de mettre en lumière la grandeur d'âme d'Auguste, qui, au lieu de punir, pardonne...) ; Auguste avait comblé de bienfaits Cinna et Émilie : de quels sentiments font-ils preuve vis-à-vis de leur bienfaiteur? Qu'eût fait Auguste s'il n'avait su résister à son désir de vengeance? N'y a-t-il pas eu lutte dans son âme entre deux sentiments? (lesquels?) ; Ne pensez-vous pas qu'il ait fallu de sa part un extraordinaire effort de volonté pour vaincre sa juste colère? (Se bien pénétrer du sens de ces expressions : Je suis maître de moi...; Conservez à jamais ma dernière victoire...); Quel est l'effet de la clémence d'Auguste sur Cinna et sur Émilie? Comment vous apparaît Auguste? Sa clémence ne le rend-elle pas encore plus grand?

II. — L'analyse du morceau ; — quelques idées secondaires. — Distinguez les différentes parties du morceau : a) Apostrophe d'Auguste : ô ciel, ô siècles...; b) Pardon accordé à Cinna et à Émilie; c) Paroles de soumission et de repentir d'Émilie; d) Réponse d'Auguste à Livie. Justifiez l'emploi de l'apostrophe, dans la première partie (Auguste n'est-il pas douloureusement frappé, et comme anéanti, par tout ce qu'il vient d'apprendre?...); Auguste ne fait-il qu'accorder son pardon à Cinna? (Voir vers 15 et suivants); Pourquoi Émilie avait-elle organisé une conspiration contre Auguste? Pourquoi dit-elle que son forfait lui semblait justice?

III. — Le style ; — les expressions. — Faites ressortir le mouvement et l'énergie du style dans cette scène; N'est-il pas quelques vers qui sont comme frappés en médaille et que la mémoire retient aisément? Lesquels? On a dit que les pièces de Corneille reposent sur un pathétique d'un genre particulier : le pathétique d'admiration; appliquez cette expression aux sentiments exprimés dans la scène qui vient d'être lue, et montrez-en la justesse; Expliquez ce vers : Préfères-en la pourpre à celle de mon sang; — à quelle critique donne-t-il lieu? Expliquez le sens de ces expressions : j'en accepte l'augure, — de meilleurs auspices.

IV. — La grammaire. — Indiquez un synonyme de courroux, —de issue; Trouvez quelques mots de la même famille que siècle, — que mémoire; Nature et fonction de chacun des mots suivants: c'est moi qui t'en convie.

Rédaction. — Auguste pardonne, au lieu de punir : montrez que cette clémence résulte d'une victoire de sa volonté.   

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