Le nabab, tome II Il y eut un instant de silence.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
avancer, on louvoie.
J'ai louvoyé...
Accusez mes débuts misérables, une entrée manquée dans l'existence, et
convenez du moins qu'une chose en moi n'a jamais menti: ma passion!...
Rien n'a pu la rebuter, ni vos dédains,
ni vos injures, ni tout ce que je lis dans vos yeux qui, depuis tant d'années, ne m'ont pas souri une fois...
C'est
encore ma passion qui me donne la force, même après ce que je viens d'entendre, de vous dire pourquoi je suis
ici...
Écoutez.
Vous m'avez déclaré un jour qu'il vous fallait un mari, quelqu'un qui veille sur vous pendant
votre travail, qui relève de faction la pauvre Crenmitz excédée.
Ce sont là vos propres paroles, qui me
déchiraient alors parce que je n'étais pas libre.
Maintenant tout est changé.
Voulez-vous m'épouser, Félicia?
Et votre femme? s'écria la jeune fille pendant que Paul s'adressait la même question.
Ma femme est morte.
Morte?...
Madame Jenkins?...
Est-ce vrai?
Vous n'avez pas connu celle dont je parle.
L'autre n'était pas ma femme.
Quand je l'ai rencontrée, j'étais
déjà marié en Irlande...
Depuis des années...
Un mariage horrible, contracté la corde au cou...
Ma chère, à
vingt-cinq ans, je me suis trouvé devant cette alternative; la prison pour dettes ou mademoiselle Strang, une
vieille fille couperosée et goutteuse, la soeur d'un usurier qui m'avait avancé cinq cents livres pour payer mes
études médicales...
J'avais préféré la prison; mais des semaines et des mois vinrent à bout de mon courage, et
j'épousai mademoiselle Strang qui m'apporta en dot...
mon billet.
Vous voyez ma vie entre ces deux monstres
qui s'adoraient.
Une femme jalouse, impotente.
Le frère m'espionnant, me suivant partout.
J'aurais pu fuir.
Mais une chose me retenait...
On disait l'usurier immensément riche.
Je voulais toucher au moins le bénéfice
de ma lâcheté...
Ah! je vous dis tout, vous voyez...
Du reste j'ai été bien puni, allez.
Le vieux Strang est mort
insolvable; il jouait, s'était ruiné, sans le dire...
Alors j'ai mis les rhumatismes de ma femme dans une maison
de santé et je suis venu en France...
C'était une existence à recommencer, de la lutte et de la misère encore.
Mais j'avais pour moi une expérience, la haine et le mépris des hommes, et la liberté reconquise, car je ne me
doutais pas que l'horrible boulet de cette union maudite allait gêner encore ma marche, à distance...
Heureusement, c'est fini, me voilà délivré...
Oui, Jenkins, délivré...
Mais pourquoi ne songez-vous pas à faire votre femme de la pauvre créature qui a
partagé votre vie si longtemps, humble et dévouée comme nous l'avons tous vue?
Oh! dit-il avec une explosion sincère, entre mes deux bagnes je crois que je préférais l'autre, où je pouvais
être franchement indifférent ou haineux...
Mais l'atroce comédie de l'amour conjugal, d'un bonheur sans
lassitude, alors que depuis si longtemps je n'aimais que vous, je ne pensais qu'à vous...
Il n'y a pas sur terre de
pareil supplice...
Si j'en juge par moi, la malheureuse a dû pousser à l'instant de la séparation un cri de
soulagement et d'allégresse.
C'est le seul adieu que j'en espérais...
Mais qui vous forçait à tant de contrainte?
Paris, la société, le monde...
Mariés devant l'opinion, nous étions tenus par elle...
Et maintenant, vous ne l'êtes donc plus?
Maintenant quelque chose domine tout, c'est l'idée de vous perdre, de ne plus vous voir...
Oh! quand j'ai
appris votre fuite, quand j'ai vu cet écriteau sur votre porte: «A LOUER», j'ai senti que c'en était fait des poses
et des grimaces, que je n'avais plus qu'à partir, à courir bien vite après mon bonheur que vous emportiez.
Vous
quittiez Paris, je l'ai quitté.
On vendait tout chez vous; chez moi, on va tout vendre.
Et elle?...
reprit Félicia frémissante...
Elle, la compagne irréprochable, l'honnête femme que personne n'a
jamais soupçonnée, où ira-t-elle? que fera-t-elle?...
Et c'est sa place que vous venez me proposer...
Une Le nabab, tome II
XXIV.
A BORDIGHERA 102.
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