Le Grand Meaulnes Meaulnes ne répondit pas.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document


«
CHAPITRE XVII.
La fête étrange (fin).
Déjà, dans la nuit, une file de voitures roulait lentement vers la grille du bois.
En tête, un homme revêtu d'une
peau de chèvre, une lanterne à la main, conduisait par la bride le cheval du premier attelage.
Meaulnes avait hâte de trouver quelqu'un qui voulût bien se charger de lui.
Il avait hâte de partir.
Il
appréhendrait, au fond du coeur, de se trouver soudain seul dans le Domaine, et que sa supercherie fût
découverte.
Lorsqu'il arriva devant le bâtiment principal les conducteurs équilibraient la charge des dernières voitures.
On
faisait lever tous les voyageurs pour rapprocher ou reculer les sièges, et les jeunes filles enveloppées dans des
fichus se levaient avec embarras, les couvertures tombaient à leurs pieds et l'on voyait les figures inquiètes de
celles qui baissaient leur tête du côté des falots.
Dans un de ces voituriers, Meaulnes reconnut le jeune paysan qui tout à l'heure avait offert de l'emmener:
"Puis-je monter? lui cria-t-il.
\24Où vas-tu, mon garçon? répondit l'autre qui ne le reconnaissait plus.
\24Du côté de Sainte-Agathe.
\24Alors il faut demander une place à Maritain" Et voilà le grand écolier cherchant parmi les voyageurs
attardés ce Maritain inconnu.
On le lui indiqua parmi les buveurs qui chantaient dans la cuisine.
"C'est un 'amusard', lui dit-on.
Il sera encore là à trois heures du matin".
Meaulnes songea un instant à la jeune fille inquiète, pleine de fièvre et de chagrin, qui entendrait chanter dans
le Domaine, jusqu'au milieu de la nuit, ces paysans avinés.
Dans quelle chambre était-elle? Où était sa
fenêtre, parmi ces bâtiments mystérieux? Mais rien ne servirait à l'écolier de s'attarder.
Il fallut partir.
Une
fois rentré à Sainte-Agathe, tout deviendrait plus clair; il cesserait d'être un écolier évadé; de nouveau il
pourrait songer à la jeune châtelaine.
Une à une, les voitures s'en allaient; les roues grinçaient sur le sable de la grande allée.
Et, dans la nuit, on les
voyait tourner et disparaître, chargées de femmes emmitouflées, d'enfants dans des fichus, qui déjà
s'endormaient.
Une grande carriole encore; un char à bancs, où les femmes étaient serrées épaule contre
épaule, passa, laissant Meaulnes interdit, sur le seuil de la demeure.
Il n'allait plus rester bientôt qu'une vieille
berline que conduisait un paysan en blouse.
"Vous pouvez monter, répondit-il aux explications d'Augustin, nous allons dans cette direction".
Péniblement Meaulnes ouvrit la portière de la vieille guimbarde, dont la vitre trembla et les gonds crièrent.
Sur la banquette, dans un coin de la voiture, deux tout petits enfants, un garçon et une fille, dormaient.
Ils
s'éveillèrent au bruit et au froid, se détendirent, regardèrent vaguement, puis en frissonnant se renfoncèrent
dans leur coin et se rendormirent.
Déjà la vieille voiture partait.
Meaulnes referma plus doucement la portière et s'installa avec précaution dans
l'autre coin; puis, avidement, s'efforça de distinguer à travers la vitre les lieux qu'il allait quitter et la route par
où il était venu: il devina, malgré la nuit, que la voiture traversait la cour et le jardin, passait devant l'escalier
de sa chambre, franchissait la grille et sortait du Domaine pour entrer dans les bois.
Fuyant le long de la vitre,
on distinguait vaguement les troncs des vieux sapins.
Le Grand Meaulnes
CHAPITRE XVII.
La fête étrange (fin).
39.
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