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Le Corricolo Les chambres d'ou l'on voit toutes ces belles choses ne sont point des appartemens; ce sont des galeries de tableau, ce sont des cabinets de curiosites, ce sont des boutiques de bric-a-brac.

Publié le 11/04/2014

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Le Corricolo Les chambres d'ou l'on voit toutes ces belles choses ne sont point des appartemens; ce sont des galeries de tableau, ce sont des cabinets de curiosites, ce sont des boutiques de bric-a-brac. Je crois que ce qui determine M. Martin Zir a recevoir chez lui des etrangers, c'est d'abord le desir de leur faire voir les tresors qu'il possede; puis il loge et nourrit les hotes par circonstance. A la fin de leur sejour a la Vittoria, un total de leur depense arrive, c'est vrai: ce total se monte a cent ecus, a vingt-cinq louis, a mille francs, plus ou moins, c'est vrai encore; mais c'est parce qu'ils demandent leur compte. S'ils ne le demandaient pas, je crois que M. Martin Zir, perdu dans la contemplation d'un tableau, dans l'appreciation d'une porcelaine ou dans le dechiffrement d'un autographe, oublierait de le leur envoyer. Aussi, lorsque le dey, chasse d'Alger, passa a Naples, charriant ses tresors et son harem, prevenu par la reputation de M. Martin Zir. il se fit conduire tout droit a l'hotel de la Vittoria, dont il loua les trois etages superieurs, c'est-a-dire le troisieme, le quatrieme et les greniers. Le troisieme etait pour ses officiers et les gens de sa suite. Le quatrieme etait pour lui et ses tresors. Les greniers etaient pour son harem. L'arrivee du dey fut une bonne fortune pour M. Martin Zir; non pas, comme on pourrait le croire, a cause de l'argent que l'Algerien allait depenser dans l'hotel, mais relativement aux tresors d'armes, de costumes et de bijoux qu'il transportait avec lui. Au bout de huit jours, Hussein-Pacha et M. Martin Zir etaient les meilleurs amis du monde; ils ne se quittaient plus. Qui voyait paraitre l'un s'attendait a voir immediatement paraitre l'autre. Oreste et Pylade n'etaient pas plus inseparables; Damon et Pythias n'etaient pas plus devoues. Cela dura quatre ou cinq mois. Pendant ce temps, on donna force fetes a Son Altesse. Ce fut a l'une de ces fetes, chez les prince de Cassaro, qu'apres avoir vu executer un cotillon effrene le dey demanda au prince de Tricasia, gendre du ministre des affaires etrangeres, comment, etant si riche, il se donnait la peine de danser lui meme. Le dey aimait fort ces sortes de divertissemens, car il etait fort impressionnable a la beaute, a la beaute comme il la comprenait bien entendu. Seulement il avait une singuliere maniere de manifester son mepris ou son admiration. Selon la maigreur ou l'obesite des personnes, il disait: --Madame une telle ne vaut pas trois piastres. Madame une telle vaut plus de mille ducats. Un jour on apprit avec etonnement que M. Martin Zir et Hussein-Pacha venaient de se brouiller. Voici a quelle occasion le refroidissement etait survenu: Un matin, le cuisinier de Hussein-Pacha, un beau negre de Nubie, noir comme de l'encre et luisant comme s'il eut ete passe au vernis; un matin, dis-je, le cuisinier de Hussein-Pacha etait descendu au laboratoire et avait demande le plus grand couteau qu'il y eut dans l'hotel. Le chef lui avait donne une espece de tranchelard de dix-huit pouces de long, pliant comme un fleuret et affile comme un rasoir. Le negre avait regarde l'instrument en secouant la tete, puis il etait remonte a son troisieme etage. Un instant apres il etait redescendu et avait rendu le tranchelard au chef en disant: --Plus grand, plus grand! I. Osmin et Zaida. 4 Le Corricolo Le chef avait alors ouvert tous ses tiroirs, et ayant decouvert un coutelas dont il ne se servait lui-meme que dans les grandes occasions, il l'avait remis a son confrere. Celui-ci avait regarde le coutelas avec la meme attention qu'il avait fait du tranchelard, et, apres avoir repondu par un signe de tete qui voulait dire: "Hum! ce n'est pas encore cela qu'il me faudrait, mais cela se rapproche," il etait remonte comme la premiere fois. Cinq minutes apres, le negre redescendit de nouveau, et, rendant le coutelas au chef: --Plus grand encore, lui dit-il. --Et pourquoi diable avez-vous besoin d'un couteau plus grand que celui-ci? demanda le chef. --Moi en avoir besoin, repondit dogmatiquement le negre. --Mais pour quoi faire? --Pour moi couper la tete a Osmin. --Comment! s'ecria le chef, pour toi couper la tete a Osmin. --Pour moi couper la tete a Osmin, repondit le negre. --A Osmin, le chef des eunuques de Sa Hautesse? --A Osmin, le chef des eunuques de Sa Hautesse. --A Osmin que le dey aime tant? --A Osmin que le dey aime tant. --Mais vous etes fou, mon cher! Si vous coupez la tete a Osmin, Sa Hautesse sera furieuse. --Sa Hautesse l'a ordonne a moi. --Ah diable! c'est different alors. --Donnez donc un autre couteau a moi, reprit le negre, qui revenait a son idee avec la persistance de l'obeissance passive. --Mais qu'a fait Osmin? demanda le chef. --Donnez un autre couteau a moi, plus grand, plus grand. --Auparavant, je voudrais savoir ce qu'a fait Osmin. --Donnez un autre couteau a moi, plus grand, plus grand, plus grand encore! --Eh bien! je te le donnerai ton couteau, si tu me dis ce qu'a fait Osmin. --Il a laisse faire un trou dans le mur. --A quel mur? I. Osmin et Zaida. 5

« Le chef avait alors ouvert tous ses tiroirs, et ayant decouvert un coutelas dont il ne se servait lui-meme que dans les grandes occasions, il l'avait remis a son confrere.

Celui-ci avait regarde le coutelas avec la meme attention qu'il avait fait du tranchelard, et, apres avoir repondu par un signe de tete qui voulait dire: “Hum! ce n'est pas encore cela qu'il me faudrait, mais cela se rapproche,” il etait remonte comme la premiere fois. Cinq minutes apres, le negre redescendit de nouveau, et, rendant le coutelas au chef: —Plus grand encore, lui dit-il. —Et pourquoi diable avez-vous besoin d'un couteau plus grand que celui-ci? demanda le chef. —Moi en avoir besoin, repondit dogmatiquement le negre. —Mais pour quoi faire? —Pour moi couper la tete a Osmin. —Comment! s'ecria le chef, pour toi couper la tete a Osmin. —Pour moi couper la tete a Osmin, repondit le negre. —A Osmin, le chef des eunuques de Sa Hautesse? —A Osmin, le chef des eunuques de Sa Hautesse. —A Osmin que le dey aime tant? —A Osmin que le dey aime tant. —Mais vous etes fou, mon cher! Si vous coupez la tete a Osmin, Sa Hautesse sera furieuse. —Sa Hautesse l'a ordonne a moi. —Ah diable! c'est different alors. —Donnez donc un autre couteau a moi, reprit le negre, qui revenait a son idee avec la persistance de l'obeissance passive. —Mais qu'a fait Osmin? demanda le chef. —Donnez un autre couteau a moi, plus grand, plus grand. —Auparavant, je voudrais savoir ce qu'a fait Osmin. —Donnez un autre couteau a moi, plus grand, plus grand, plus grand encore! —Eh bien! je te le donnerai ton couteau, si tu me dis ce qu'a fait Osmin. —Il a laisse faire un trou dans le mur. —A quel mur? Le Corricolo I.

Osmin et Zaida.

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