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Le Corricolo Le tombeau de Calventius, decouvert en 1813, est, comme celui des deux Tyches, du beau temps de l'architecture romaine.

Publié le 11/04/2014

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Le Corricolo Le tombeau de Calventius, decouvert en 1813, est, comme celui des deux Tyches, du beau temps de l'architecture romaine. Aussi, comme pour le defendre des injures des passans, est-il environne de murailles sans ouverture. Sa matiere est de marbre blanc, ses ornemens sont d'un beau style, et il se termine par deux enroulemens de palmes avec des tetes de beliers. C'etait, comme Munatius Faustus, un augustal; comme Munatius Faustus, il jouissait des honneurs du bisellium. Voici son epitaphe: "A Caius Calventius Quietus Augustal. L'honneur du bisellium lui a ete decerne par le decret des decurions, et avec le consentement du peuple, a cause de sa magnificence." Le cenotaphe de Calventius est massif, c'est-a-dire que c'est un tombeau honorifique. Le mur qui l'entoure et le protege avait fait croire qu'en penetrant dans l'interieur, on y trouverait quelque tresor cache. En consequence, on brisa le monument du cote qui regarde l'ouest. Mais alors on s'apercut que l'on venait de commettre un sacrilege inutile. Deux couronnes de chene indiquent qu'a l'honneur du bisellium Calventius joignait l'honneur plus insigne encore d'avoir recu la couronne civique. Outre les quatre tombeaux que nous venons de decrire, il y en a une soixantaine d'autres devant lesquels nous nous contentons de faire passer le lecteur, comme Ruy Gomez de Sylva fait passer Charles-Quint devant une partie de ses aieux. Seulement, nous le prevenons, comme le fait le respectable tuteur de dona Sol, que nous en passons, et des meilleurs, afin d'arriver plus vite a la porte de Pompeia. XIV. Petites Affiches. Nous suivimes la voie consulaire et nous arrivames a la porte d'Herculanum. Disons un mot de la voie consulaire et de la porte d'Herculanum; puis nous ferons un tour dans la ville meme de Pompeia. La voie consulaire etait un rameau de cette fameuse voie Appienne qui allait de Rome a Naples; elle la joignait au nord a Capoue, et s'etendait au midi jusqu'a Reggio: c'etait la troisieme voie romaine decrite par Strabon, qui passait par le pays des Brutiens, la Lucanie, le Samnium, la Campanie, ou elle rejoignait la voie Appienne. Ces grands chemins etaient sous l'inspection des censeurs, qui devaient les tenir en bon etat. Tite-Live trace a ces estimables magistrats les devoirs qu'ils avaient a remplir a cet egard. "Les censeurs, dit-il, doivent, dans l'interieur des villes, faire construire les chemins avec de la pierre de silex; mais, dans la campagne et hors les murs, c'est avec des cailloux que les routes et les trottoirs doivent etre fabriques." Or, qu'etaient-ce que ces chemins en cailloutis, si ce n'est nos routes ferrees? M. Macadam est un grand plagiaire d'avoir donne la recette comme de lui, tandis qu'elle date, ainsi qu'on le voit, d'une vingtaine d'annees avant le Christ. La ville de Pompeia est encore aujourd'hui pavee selon les reglemens de l'epoque. Seulement, hors des murs, dans la campagne, les routes se sont un peu deteriorees, et il n'y aurait pas de mal que les censeurs s'en occupassent. Quant a la porte d'Herculanum, il n'y faut rien changer, elle est bien celle qui convient a la necropole a laquelle elle donne entree: ruine qui conduit a des ruines, poterne sans gardes qui mene a une ville sans habitans. Sa voute s'est ecroulee, lassee qu'elle etait de porter dix-sept siecles. La herse s'est faite poussiere comme la poussiere qui la couvrait; mais les ouvertures laterales, plus etroites et plus basses, ont conserve leurs voutes; XIV. Petites Affiches. 294 Le Corricolo on voit encore la rainure ou glissait la barriere disparue. En arrivant sur le seuil de Pompeia, on s'arrete un instant, on regarde autour de soi, on regarde devant soi, on plonge les yeux devant toutes les courbures des rues, dans tous les angles des ruines, dans tous les plis du terrain; on ne voit pas un etre vivant; on ecoute, on n'entend pas un seul bruit. Alors se presente un escalier aux larges marches; cet escalier conduit aux murailles publiques, qui furent decouvertes de 1811 a 1814, c'est-a-dire pendant le regne de Murat. Ces murailles furent baties, comme celles de Fiesole, de Roselle et de Volterra, avec de grandes pierres de travertin a leur base, et dans leur partie superieure avec des pierres volcaniques posees les unes sur les autres, sans autre lien que leur propre aplomb, sans autre ciment que leur seul poids. Trois chars pouvaient y passer de front, et aujourd'hui l'on peut s'y promener comme aux jours de Sylla et de Ciceron. Des lettres osques et etrusques sont gravees sur le revers de chaque pierre; on suppose que, ces pierres se taillant d'avance dans la carriere d'ou on les tirait, les lettres etaient des signes traces par les ouvriers pour reconnaitre la position qu'etait destinee a occuper chacune d'elles. Du haut de cette muraille on plane, comme Asmodee, sur une ville sans toits. En descendant de la muraille, on trouve a gauche la maison du triclinium; un banc recouvert d'une treille lui a fait donner ce nom gastronomique. Elle avait ete mise par son maitre sous la garde de la Fortune, dont on retrouva l'image dans une espece de petite chapelle. En face de cette maison est celle de Jules Polybe. Il n'y avait point a se tromper sur celle-la, le nom de JULIUS POLIBIUS etant ecrit sur la porte en lettres noires. Maintenant, quelle etait sa destination? Les savans veulent, les uns que ce soit une auberge, les autres un relais de poste. Ils se fondent sur ce qu'on y a trouve des ossemens de chevaux et des pieces de fer qui ne pouvaient etre que des essieux. Apres cette maison s'eleve un grand pilier dont la nature occupa fort l'academie d'Herculanum. Elle pretendit d'abord, entre autres choses, que cette image etait un talisman contre la jettatura, et puis elle y reconnut une enseigne de bijoutier. Comme cette opinion etait la moins plausible, tout le monde s'y rallia. Il est vrai que les fouilles executees dans la maison attenante produisirent une quantite tres grande d'objets pareils en corail, en or et en argent, lesquels se portaient autrefois, comme se portent encore aujourd'hui a Naples les mains et les cornes. Il faut dire le pour et le contre. Mais ce qui nous frappa surtout, c'est la quantite, c'est la variete des inscriptions en lettres noires ou rouges, en caracteres osques ou samnites, en latin ou en grec, qui couvrent les murailles. Londres, la ville des puffs par excellence, ou chaque coin de muraille blanche est loue, ou les affiches, apres s'etre hissees du premier au second etage, grimpent du second etage au troisieme, enjambent le toit et vont se coller a la cheminee, Londres est, sous ce rapport, bien en arriere de Pompeia: qu'est-ce qu'un malheureux lambeau de papier que le premier vent emporte, que la premiere pluie decolle, que le premier gamin arrache, pres de cette encre indelebile qui dure depuis dix-huit cents ans! Aussi, au lieu d'entrer tout d'abord dans les maisons, nous nous mimes a courir les rues le nez en l'air comme de veritables badauds, lisant les enseignes des boutiques et les affiches des spectacles, exactement comme ces provinciaux qui se demandent: Acheterons-nous une canne ou un parapluie? Irons-nous aux Varietes ou a l'Opera? N'est-ce pas une chose curieuse en effet, que de voir encore survivre aux habitans, aux maisons, a la XIV. Petites Affiches. 295
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« on voit encore la rainure ou glissait la barriere disparue. En arrivant sur le seuil de Pompeia, on s'arrete un instant, on regarde autour de soi, on regarde devant soi, on plonge les yeux devant toutes les courbures des rues, dans tous les angles des ruines, dans tous les plis du terrain; on ne voit pas un etre vivant; on ecoute, on n'entend pas un seul bruit. Alors se presente un escalier aux larges marches; cet escalier conduit aux murailles publiques, qui furent decouvertes de 1811 a 1814, c'est-a-dire pendant le regne de Murat. Ces murailles furent baties, comme celles de Fiesole, de Roselle et de Volterra, avec de grandes pierres de travertin a leur base, et dans leur partie superieure avec des pierres volcaniques posees les unes sur les autres, sans autre lien que leur propre aplomb, sans autre ciment que leur seul poids.

Trois chars pouvaient y passer de front, et aujourd'hui l'on peut s'y promener comme aux jours de Sylla et de Ciceron. Des lettres osques et etrusques sont gravees sur le revers de chaque pierre; on suppose que, ces pierres se taillant d'avance dans la carriere d'ou on les tirait, les lettres etaient des signes traces par les ouvriers pour reconnaitre la position qu'etait destinee a occuper chacune d'elles. Du haut de cette muraille on plane, comme Asmodee, sur une ville sans toits. En descendant de la muraille, on trouve a gauche la maison du triclinium; un banc recouvert d'une treille lui a fait donner ce nom gastronomique.

Elle avait ete mise par son maitre sous la garde de la Fortune, dont on retrouva l'image dans une espece de petite chapelle. En face de cette maison est celle de Jules Polybe.

Il n'y avait point a se tromper sur celle-la, le nom de JULIUS POLIBIUS etant ecrit sur la porte en lettres noires. Maintenant, quelle etait sa destination? Les savans veulent, les uns que ce soit une auberge, les autres un relais de poste.

Ils se fondent sur ce qu'on y a trouve des ossemens de chevaux et des pieces de fer qui ne pouvaient etre que des essieux. Apres cette maison s'eleve un grand pilier dont la nature occupa fort l'academie d'Herculanum.

Elle pretendit d'abord, entre autres choses, que cette image etait un talisman contre la jettatura, et puis elle y reconnut une enseigne de bijoutier.

Comme cette opinion etait la moins plausible, tout le monde s'y rallia. Il est vrai que les fouilles executees dans la maison attenante produisirent une quantite tres grande d'objets pareils en corail, en or et en argent, lesquels se portaient autrefois, comme se portent encore aujourd'hui a Naples les mains et les cornes.

Il faut dire le pour et le contre. Mais ce qui nous frappa surtout, c'est la quantite, c'est la variete des inscriptions en lettres noires ou rouges, en caracteres osques ou samnites, en latin ou en grec, qui couvrent les murailles.

Londres, la ville des puffs par excellence, ou chaque coin de muraille blanche est loue, ou les affiches, apres s'etre hissees du premier au second etage, grimpent du second etage au troisieme, enjambent le toit et vont se coller a la cheminee, Londres est, sous ce rapport, bien en arriere de Pompeia: qu'est-ce qu'un malheureux lambeau de papier que le premier vent emporte, que la premiere pluie decolle, que le premier gamin arrache, pres de cette encre indelebile qui dure depuis dix-huit cents ans! Aussi, au lieu d'entrer tout d'abord dans les maisons, nous nous mimes a courir les rues le nez en l'air comme de veritables badauds, lisant les enseignes des boutiques et les affiches des spectacles, exactement comme ces provinciaux qui se demandent: Acheterons-nous une canne ou un parapluie? Irons-nous aux Varietes ou a l'Opera? N'est-ce pas une chose curieuse en effet, que de voir encore survivre aux habitans, aux maisons, a la Le Corricolo XIV.

Petites Affiches.

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