L'auberge de l'ange gardien Le general descendit le perron, entrainant Mme Blidot, suivi d'Elfy qui donnait le bras a Moutier, et du reste de la societe.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
LE GENERAL.A-t-on fini le cafe, le pousse-cafe, tout enfin?
Fini a la majorite, mon general, repondit Moutier, fatigue de boire et de manger.
Allons, partons.
J'ouvre la marche avec Elfy.
Le general se leva; chacun en fit autant.
Il ouvrit lui-meme la porte du jardin.
Elfy poussa une exclamation
joyeuse, quitta le bras du general et courut legere comme un oiseau, vers la barriere elegante qui avait ete
placee et ouverte sur le pre pendant la courte absence des proprietaires.
Jacques et Paul la suivirent dans sa course, et furent bientot hors de vue.
LE GENERAL.Moutier, mon ami, courez apres les fuyards, attrapez-les, ramenez-les-moi! Je ne serai pas
loin...
Eh bien! voila tout le monde parti!...
Les voila qui courent tous comme des chevaux echappes...
jusqu'au notaire!...
Et ce pauvre Derigny, que Mme Blidot entraine! Il court, ma foi! il court!
Le general, enchante, se frottait les mains, allait et venait en sautillant malgre ses grosses jambes, son gros
ventre et ses larges epaules.
De temps a autre, on voyait apparaitre dans le pre, dans le bois, Elfy et les
enfants; Moutier l'avait rejointe en deux enjambees et jouissait du bonheur d'Elfy avec toute la vivacite de son
affection.
Bientot le bois et la prairie offrirent le spectacle le plus anime; les jeunes couraient, criaient, riaient;
les gens sages se promenaient, admiraient et se rejouissaient du bonheur d'Elfy d'avoir rencontre dans sa vie
un general Dourakine.
Elfy et sa soeur etaient si generalement aimees que leur heureuse chance ne donnait de
jalousie a personne, et occasionnait, au contraire, une satisfaction generale.
Le cure seul etait reste aupres du
general.
Vous devez etre bien heureux, lui dit-il en souriant amicalement, de tout le bonheur que vous avez cause;
vous etes veritablement une Providence pour ces excellentes soeurs, pour votre brave Moutier et pour toute
notre commune.
Jamais on n'y perdra votre souvenir, general, et, quant a moi, je prierai pour vous tous les
jours de ma Vie.
LE GENERAL.Merci, mon bon cure.
Mais notre tache n'est pas finie, il faut que vous m'aidiez a la
completer.
LE CURE.Tout ce que vous voudrez, general, disposez de moi entierement.
LE GENERAL.Eh bien, mon ami, voila l'affaire.
J'aime beaucoup Mme Blidot, et je vois avec peine que le
mariage de sa soeur va changer sa position.
LE CURE:Oh! general, elles s'aiment tant, et Moutier est un homme si bon, si honorable, si religieux!
LE GENERAL.Tout ca est vrai, mon ami, mais...
Mme Blidot ne va plus venir qu'en second; c'est le jeune
menage qui a maintenant le plus gros lot dans la propriete de l'Ange-Gardien; un homme dans une auberge
est toujours plus maitre que des femmes.
Et puis viendront les enfants; Jacques et Paul pourraient en souffrir,
Mme Blidot, qui les aime si tendrement, les protegera; et puis viendra le desaccord, et, par suite, les chagrins
pour cette pauvre femme isolee.
LE CURE.C'est vrai, general; mais qu'y faire, sinon attendre, esperer, et au besoin lui donner du courage?
LE GENERAL.Mon cher cure, voici mon idee a moi.
Quand la guerre sera finie, ce qui va arriver un de ces
jours, il faudra que je retourne en Russie; j'emmenerai Derigny...
Attendez, vous ne savez pas ce que je vais
vous dire...
J'emmenerai ses enfants; voila deja qu'ils restent avec leur pere et qu'ils sont a l'abri de ce que je L'auberge de l'ange gardien
XXI.
Le contrat.
Generosite inattendue.
76.
»
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