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La Curée Céleste prit la chemise des mains du jeune homme.

Publié le 11/04/2014

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La Curée Céleste prit la chemise des mains du jeune homme. Il se leva, alla regarder le grand lit gris et rose, s'arrêta à un des bouquets brochés de la tenture pour tourner la tête, pour ne pas voir les seins nus de Renée. C'était instinctif. Il ne se croyait plus son amant, il n'avait plus le droit de voir. Puis il tira un cigare de sa poche et l'alluma. Renée lui avait permis de fumer chez elle. Enfin Céleste se retira, laissant la jeune femme au coin du feu, toute blanche dans son vêtement de nuit. Maxime marcha encore quelques instants, silencieux, regardant du coin de l'oeil Renée, qu'un frisson semblait reprendre. Et, se plantant devant la cheminée, le cigare aux dents, il demanda d'une voix brusque : Pourquoi ne m'as-tu pas dit que c'était mon père qui se trouvait avec toi, hier soir? Elle leva la tête, les yeux tout grands, avec un regard de suprême angoisse, puis un flot de sang lui empourpra la face, et, anéantie de honte, elle se cacha dans ses mains, elle balbutia: Tu sais cela? tu sais cela?... Elle se reprit, elle essaya de mentir. Ce n'est pas vrai... qui te l'a dit? Maxime haussa les épaules. Pardieu, mon père lui-même, qui te trouve joliment faite et qui m'a parlé de tes hanches. Il avait laissé percer un léger dépit. Mais il se remit à marcher, continuant d'une voix grondeuse et amicale, entre deux bouffées de cigare: Vraiment, je ne te comprends pas. Tu es une singulière femme. Hier, c'est ta faute, si j'ai été grossier. Tu m'aurais dit que c'était mon père, je m'en serais allé tranquillement, tu comprends? Moi, je n'ai pas le droit... Mais tu vas me nommer M. de Saffré! Elle sanglotait, les mains sur son visage. Il s'approcha, s'agenouilla devant elle, lui écarta les mains de force. Voyons, dis-moi pourquoi tu m'as nommé M. de Saffré. Alors, détournant encore la tête, elle répondit au milieu de ses larmes, à voix basse: Je croyais que tu me quitterais, si tu savais que ton père... Il se releva, reprit son cigare qu'il avait posé sur un coin de la cheminée, et se contenta de murmurer: Tu es bien drôle, va!... Elle ne pleurait plus. Les flammes de la cheminée et le feu de ses joues séchaient ses larmes. L'étonnement de voir Maxime si calme devant une révélation qu'elle croyait devoir l'écraser lui faisait oublier sa honte. Elle le regardait marcher, elle l'écoutait parler comme dans un rêve. Il lui répétait, sans quitter son cigare, qu'elle n'était pas raisonnable, qu'il était tout naturel qu'elle eût des rapports avec son mari, mais qu'il ne pouvait vraiment songer à s'en fâcher. Mais aller avouer un amant quand ce n'était pas vrai. Et il revenait toujours à cela, à cette chose qu'il ne pouvait comprendre, et qui lui semblait réellement monstrueuse, parla des « imaginations folles » des femmes. PARTIE V 121 La Curée Tu es une fêlée, ma chère, il faut soigner ça. Il finit par demander curieusement: Mais pourquoi M. de Saffré plutôt qu'un autre? Il me fait la cour, dit Renée. Maxime retint une impertinence; il allait dire qu'elle s'était sans doute crue plus vieille d'un mois en avouant M. de Saffré pour amant. Il n'eut que le sourire mauvais de cette méchanceté, et, jetant son cigare dans le feu, il vint s'asseoir de l'autre côté de la cheminée. Là, il parla raison, il donna à entendre à Renée qu'ils devaient rester bons camarades. Les regards fixes de la jeune femme l'embarrassaient un peu, pourtant; il n'osa pas lui annoncer son mariage. Elle le contemplait longuement, les yeux encore gonflés par les larmes. Elle le trouvait pauvre, étroit, misérable, et elle l'aimait toujours, de cette tendresse qu'elle avait pour ses dentelles. Il était joli sous la lumière du candélabre, placé au bord de la cheminée, à côté de lui. Comme il renversait la tête, la lueur des bougies lui dorait les cheveux, lui glissait sur la face, dans le duvet léger des joues, avec des blondeurs charmantes. Il faut pourtant que je m'en aille, dit-il à plusieurs reprises. Il était bien décidé à ne pas rester. Renée ne l'aurait pas voulu d'ailleurs. Tous deux le pensaient, le disaient; ils n'étaient plus que deux amis. Et, quand Maxime eut enfin serré la main de la jeune femme et qu'il fut sur le point de quitter la chambre, elle le retint encore un instant, en lui parlant de son père. Elle en faisait un grand éloge. Vois-tu, j'avais trop de remords. Je préfère que ça soit arrivé... Tu ne connais pas ton père; j'ai été étonnée de le trouver si bon, si désintéressé. Le pauvre homme a de si gros soucis en ce moment. Maxime regardait la pointe de ses bottines, sans répondre, d'un air gêné. Elle insistait. Tant qu'il ne venait pas dans cette chambre, ça m'était égal. Mais après... Quand je le voyais ici, affectueux, m'apportant un argent qu'il avait dû ramasser dans tous les coins de Paris, se ruinant pour moi sans une plainte, j'en devenais malade... Si tu savais avec quel soin il a veillé à mes intérêts! Le jeune homme revint doucement à la cheminée, contre laquelle il s'adossa. Il restait embarrassé, la tête basse, avec un sourire qui montait peu à peu de ses lèvres. Oui, murmura-t-il, mon père est très fort pour veiller aux intérêts des gens. Le son de sa voix étonna Renée. Elle le regarda, et lui, comme pour se défendre: Oh! je ne sais rien... Je dis seulement que mon père est un habile homme. Tu aurais tort d'en mal parler, reprit-elle. Tu dois le juger un peu en l'air... Si je te faisais connaître tous ses embarras, si je te répétais ce qu'il me confiait encore ce soir, tu verrais comme on se trompe, quand on croit qu'il tient à l'argent... Maxime ne put retenir un haussement d'épaules. Il interrompit sa belle-mère, d'un rire d'ironie. Va, je le connais, je le connais beaucoup... Elle a dû te dire de bien jolies choses. Conte-moi donc ça. PARTIE V 122

« \24 Tu es une fêlée, ma chère, il faut soigner ça.

Il finit par demander curieusement: \24 Mais pourquoi M.

de Saffré plutôt qu'un autre? \24 Il me fait la cour, dit Renée.

Maxime retint une impertinence; il allait dire qu'elle s'était sans doute crue plus vieille d'un mois en avouant M.

de Saffré pour amant.

Il n'eut que le sourire mauvais de cette méchanceté, et, jetant son cigare dans le feu, il vint s'asseoir de l'autre côté de la cheminée.

Là, il parla raison, il donna à entendre à Renée qu'ils devaient rester bons camarades.

Les regards fixes de la jeune femme l'embarrassaient un peu, pourtant; il n'osa pas lui annoncer son mariage.

Elle le contemplait longuement, les yeux encore gonflés par les larmes.

Elle le trouvait pauvre, étroit, misérable, et elle l'aimait toujours, de cette tendresse qu'elle avait pour ses dentelles.

Il était joli sous la lumière du candélabre, placé au bord de la cheminée, à côté de lui.

Comme il renversait la tête, la lueur des bougies lui dorait les cheveux, lui glissait sur la face, dans le duvet léger des joues, avec des blondeurs charmantes.

\24 Il faut pourtant que je m'en aille, dit-il à plusieurs reprises.

Il était bien décidé à ne pas rester.

Renée ne l'aurait pas voulu d'ailleurs.

Tous deux le pensaient, le disaient; ils n'étaient plus que deux amis.

Et, quand Maxime eut enfin serré la main de la jeune femme et qu'il fut sur le point de quitter la chambre, elle le retint encore un instant, en lui parlant de son père.

Elle en faisait un grand éloge.

\24 Vois-tu, j'avais trop de remords.

Je préfère que ça soit arrivé...

Tu ne connais pas ton père; j'ai été étonnée de le trouver si bon, si désintéressé.

Le pauvre homme a de si gros soucis en ce moment.

Maxime regardait la pointe de ses bottines, sans répondre, d'un air gêné.

Elle insistait.

\24 Tant qu'il ne venait pas dans cette chambre, ça m'était égal.

Mais après...

Quand je le voyais ici, affectueux, m'apportant un argent qu'il avait dû ramasser dans tous les coins de Paris, se ruinant pour moi sans une plainte, j'en devenais malade...

Si tu savais avec quel soin il a veillé à mes intérêts! Le jeune homme revint doucement à la cheminée, contre laquelle il s'adossa.

Il restait embarrassé, la tête basse, avec un sourire qui montait peu à peu de ses lèvres.

\24 Oui, murmura-t-il, mon père est très fort pour veiller aux intérêts des gens.

Le son de sa voix étonna Renée.

Elle le regarda, et lui, comme pour se défendre: \24 Oh! je ne sais rien...

Je dis seulement que mon père est un habile homme.

\24 Tu aurais tort d'en mal parler, reprit-elle.

Tu dois le juger un peu en l'air...

Si je te faisais connaître tous ses embarras, si je te répétais ce qu'il me confiait encore ce soir, tu verrais comme on se trompe, quand on croit qu'il tient à l'argent...

Maxime ne put retenir un haussement d'épaules.

Il interrompit sa belle-mère, d'un rire d'ironie.

\24 Va, je le connais, je le connais beaucoup...

Elle a dû te dire de bien jolies choses.

Conte-moi donc ça.

La Curée PARTIE V 122. »

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