La Curée Céleste prit la chemise des mains du jeune homme.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
\24 Tu es une fêlée, ma chère, il faut soigner ça.
Il finit par demander curieusement:
\24 Mais pourquoi M.
de Saffré plutôt qu'un autre?
\24 Il me fait la cour, dit Renée.
Maxime retint une impertinence; il allait dire qu'elle s'était sans doute crue plus vieille d'un mois en avouant
M.
de Saffré pour amant.
Il n'eut que le sourire mauvais de cette méchanceté, et, jetant son cigare dans le feu,
il vint s'asseoir de l'autre côté de la cheminée.
Là, il parla raison, il donna à entendre à Renée qu'ils devaient
rester bons camarades.
Les regards fixes de la jeune femme l'embarrassaient un peu, pourtant; il n'osa pas lui
annoncer son mariage.
Elle le contemplait longuement, les yeux encore gonflés par les larmes.
Elle le trouvait
pauvre, étroit, misérable, et elle l'aimait toujours, de cette tendresse qu'elle avait pour ses dentelles.
Il était joli
sous la lumière du candélabre, placé au bord de la cheminée, à côté de lui.
Comme il renversait la tête, la
lueur des bougies lui dorait les cheveux, lui glissait sur la face, dans le duvet léger des joues, avec des
blondeurs charmantes.
\24 Il faut pourtant que je m'en aille, dit-il à plusieurs reprises.
Il était bien décidé à ne pas rester.
Renée ne l'aurait pas voulu d'ailleurs.
Tous deux le pensaient, le disaient;
ils n'étaient plus que deux amis.
Et, quand Maxime eut enfin serré la main de la jeune femme et qu'il fut sur le
point de quitter la chambre, elle le retint encore un instant, en lui parlant de son père.
Elle en faisait un grand
éloge.
\24 Vois-tu, j'avais trop de remords.
Je préfère que ça soit arrivé...
Tu ne connais pas ton père; j'ai été étonnée
de le trouver si bon, si désintéressé.
Le pauvre homme a de si gros soucis en ce moment.
Maxime regardait la pointe de ses bottines, sans répondre, d'un air gêné.
Elle insistait.
\24 Tant qu'il ne venait pas dans cette chambre, ça m'était égal.
Mais après...
Quand je le voyais ici, affectueux,
m'apportant un argent qu'il avait dû ramasser dans tous les coins de Paris, se ruinant pour moi sans une
plainte, j'en devenais malade...
Si tu savais avec quel soin il a veillé à mes intérêts!
Le jeune homme revint doucement à la cheminée, contre laquelle il s'adossa.
Il restait embarrassé, la tête
basse, avec un sourire qui montait peu à peu de ses lèvres.
\24 Oui, murmura-t-il, mon père est très fort pour veiller aux intérêts des gens.
Le son de sa voix étonna Renée.
Elle le regarda, et lui, comme pour se défendre:
\24 Oh! je ne sais rien...
Je dis seulement que mon père est un habile homme.
\24 Tu aurais tort d'en mal parler, reprit-elle.
Tu dois le juger un peu en l'air...
Si je te faisais connaître tous ses
embarras, si je te répétais ce qu'il me confiait encore ce soir, tu verrais comme on se trompe, quand on croit
qu'il tient à l'argent...
Maxime ne put retenir un haussement d'épaules.
Il interrompit sa belle-mère, d'un rire d'ironie.
\24 Va, je le connais, je le connais beaucoup...
Elle a dû te dire de bien jolies choses.
Conte-moi donc ça.
La Curée
PARTIE V 122.
»
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