La Conquete De Plassans --Je vous demande pardon, mais je ne suis pas dévot, monsieur l'abbé.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
Mouret leva les yeux.
Comme toutes les après-midi, dit-il tranquillement: ce sont les intimes de monsieur Péqueur des Saulaies,
notre sous-préfet....
L'été, ils se réunissent également le soir, autour du bassin que vous ne pouvez voir, à
gauche....
Ah! monsieur de Condamin est de retour.
Ce beau vieillard, l'air conservé, fort de teint; c'est notre
conservateur des eaux et forêts, un gaillard qu'on rencontre toujours à cheval, ganté, les culottes collantes.
Et
menteur avec ça! Il n'est pas du pays; il a épousé dernièrement une toute jeune femme....
Enfin, ce ne sont pas
mes affaires, heureusement.
Il baissa de nouveau la tête, en entendant Désirée, qui jouait avec Serge, rire de son rire de gamine.
Mais
l'abbé, dont le visage se colorait légèrement, le ramena d'un mot:
Est-ce le sous-préfet, demanda-t-il, le gros monsieur en cravate blanche?
Cette question amusa Mouret extrêmement.
Ah! non, répondit-il en riant.
On voit bien que vous ne connaissez pas monsieur Péqueur des Saulaies.
Il
n'a pas quarante ans.
Il est grand, joli garçon, très-distingué....
Ce gros monsieur est le docteur Porquier, le
médecin qui soigne la société de Plassans.
Un homme heureux, je vous assure.
Il n'a qu'un chagrin, son fils
Guillaume....
Maintenant, vous voyez les deux personnes qui sont assises sur le banc, et qui nous tournent le
dos.
C'est monsieur Paloque, le juge, et sa femme.
Le ménage le plus laid du pays.
On ne sait lequel est le plus
abominable de la femme ou du mari.
Heureusement qu'ils n'ont pas d'enfants.
Et Mouret se mit à rire plus haut.
Il s'échauffait, se démenait, frappant de la main la barre d'appui.
Non, reprit-il, montrant d'un double mouvement de tête le jardin des Rastoil et le jardin de la
sous-préfecture, je ne puis regarder ces deux sociétés, sans que cela me fasse faire du bon sang....
Vous ne
vous occupez pas de politique, monsieur l'abbé, autrement je vous ferais bien rire....
Imaginez-vous qu'à tort
ou à raison je passe pour un républicain.
Je cours beaucoup les campagnes, à cause de mes affaires; je suis
l'ami des paysans; on a même parlé de moi pour le conseil général; enfin, mon nom est connu....
Eh bien! j'ai
là, à droite, chez les Rastoil, la fine fleur de la légitimité, et là, à gauche, chez le sous-préfet, les gros bonnets
de l'empire.
Hein! est-ce assez drôle? mon pauvre vieux jardin si tranquille, mon petit coin de bonheur, entre
ces deux camps ennemis.
J'ai toujours peur qu'ils ne se jettent des pierres par-dessus mes murs....
Vous
comprenez, leurs pierres pourraient tomber dans mon jardin.
Cette plaisanterie acheva d'enchanter Mouret.
Il
se rapprocha de l'abbé, de l'air d'une commère qui va en dire long.
Plassans est fort curieux, au point de vue politique.
Le coup d'État a réussi ici, parce que la ville est
conservatrice.
Mais, avant tout, elle est légitimiste et orléaniste, si bien que, dès le lendemain de l'empire, elle
a voulu dicter ses conditions.
Comme on ne l'a pas écoutée, elle s'est fâchée, elle est passée à l'opposition.
Oui, monsieur l'abbé, à l'opposition.
L'année dernière, nous avons nommé député le marquis de Lagrifoul, un
vieux gentilhomme d'une intelligence médiocre, mais dont l'élection a joliment embêté la sous-préfecture....
Et regardez, le voilà, monsieur Péqueur des Saulaies; il est avec le maire, monsieur Delangre.
L'abbé regarda vivement.
Le sous-préfet, très-brun, souriait, sous ses moustaches cirées; il était d'une
correction irréprochable; son allure tenait du bel officier et du diplomate aimable.
A côté de lui, le maire
s'expliquait, avec toute une fièvre de gestes et de paroles.
Il paraissait petit, les épaules carrées, le masque
fouillé, tournant au polichinelle.
Il devait parler trop.
Monsieur Péqueur des Saulaies, continua Mouret, a failli en tomber malade.
Il croyait l'élection du candidat
officiel assurée....
Je me suis bien amusé.
Le soir de l'élection, le jardin de la sous-préfecture est resté noir et
sinistre comme un cimetière; tandis que chez les Rastoil, il y avait des bougies sous les arbres, et des rires, et La Conquete De Plassans
IV 24.
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