La Bete Humaine Alors, très nettement, Séverine conta comme quoi son mari était menacé d'une destitution.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
Et il poussa devant elle un petit guéridon, en cessant de la regarder, pour ne point l'effrayer trop.
Elle avait
frémi: il voulait une page de son écriture, afin de la comparer à la lettre.
Un instant, elle chercha
désespérément un prétexte, résolue à ne pas écrire.
Puis, elle réfléchit: à quoi bon? puisqu'il savait.
On aurait
toujours quelques lignes d'elle.
Sans aucun trouble apparent, de l'air le plus simple du monde, elle écrivit ce
qu'il demandait; tandis que, debout derrière elle, il reconnaissait parfaitement l'écriture, plus haute, moins
tremblée que celle du billet.
Et il finissait par la trouver très brave, cette petite femme fluette; il souriait de
nouveau, maintenant qu'elle ne pouvait le voir, de son sourire d'homme que le charme seul touchait encore,
dans son insouciance expérimentée de toutes choses.
Au fond, rien ne valait la fatigue d'être juste.
Il veillait
uniquement au décor du régime qu'il servait.
\24Eh bien! madame, remettez-moi cela, je m'informerai, j'agirai pour le mieux.
\24Je vous suis très reconnaissante, monsieur...
Alors, vous obtiendrez le maintien de mon mari, je puis
considérer l'affaire comme arrangée?
\24Ah! par exemple non! je ne m'engage à rien...
Il faut que je voie, que je réfléchisse.
En effet, il était hésitant, il ne savait quel parti il allait prendre à l'égard du ménage.
Et elle n'avait plus qu'une
angoisse, depuis qu'elle se sentait à sa merci: cette hésitation, l'alternative d'être sauvée ou perdue par lui,
sans pouvoir deviner les raisons qui le décideraient.
\24Oh! monsieur, songez à notre tourment.
Vous ne me laisserez pas partir, avant de m'avoir donné une
certitude.
\24Mon Dieu! si, madame.
Je n'y puis rien.
Attendez.
Il la poussait vers la porte.
Elle s'en allait, désespérée, bouleversée, sur le point de tout avouer à voix haute,
dans un besoin immédiat de le forcer à dire nettement ce qu'il comptait faire d'eux.
Pour rester une minute
encore, espérant trouver un détour, elle s'écria:
\24J'oubliais, je désirais vous demander un conseil, à propos de ce malheureux testament...
Pensez-vous que
nous devions refuser le legs?
\24La loi est pour vous, répondit-il prudemment.
C'est chose d'appréciation et de circonstance.
Elle était sur le seuil, elle tenta un dernier effort.
\24Monsieur, je vous en supplie, ne me laissez pas partir ainsi, dites-moi si je dois espérer.
D'un geste d'abandon, elle lui avait pris la main.
Il se dégagea.
Mais elle le regardait avec de beaux yeux, si
ardents de prière, qu'il en fut remué.
\24Eh bien! revenez à cinq heures.
Peut-être aurai-je quelque chose à vous dire.
Elle partit, elle quitta l'hôtel, plus angoissée encore qu'elle n'y était venue.
La situation s'était précisée, et son
sort demeurait en suspens, sous la menace d'une arrestation peut-être immédiate.
Comment vivre jusqu'à cinq
heures? La pensée de Jacques, qu'elle avait oublié, se réveilla en elle tout d'un coup: encore un qui pouvait la
perdre, si on l'arrêtait! Bien qu'il fût à peine deux heures et demie, elle se hâta de monter la rue du Rocher,
vers la rue Cardinet.
M.
Camy-Lamotte, resté seul, s'était arrêté devant son bureau.
Familier des Tuileries, où sa fonction de La Bete Humaine
V 72.
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