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JUSTIFICATION DU MEURTRE (par le marquis de Sade)

Publié le 22/02/2012

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sade
La seule chose que nous faisons, en nous livrant à la destruction, n'est que d'opérer une variation dans les formes, mais qui ne peut éteindre la vie et il devient alors au-dessus des forces humaines de prouver qu'il puisse exister aucun crime dans la prétendue destruction d'une créature, de quelque âge, de quelque sexe, de quelque espèce que vous le supposiez. Conduits plus avant encore par la série de nos conséquences, qui naissent toutes les unes des autres, il faudra convenir enfin que, loin de nuire à la nature, l'action que vous commettez, en variant les formes de ses différents ouvrages, est avantageuse pour elle puisque vous lui fournissez par cette action la matière première de ses reconstructions, dont le travail lui deviendrait impraticable si vous n'anéantissiez pas. Eh ! Laissez-la faire, vous dit-on. Assurément, il faut la laisser faire, mais ce sont ses impulsions que suit l'homme quand il se livre à l'homicide ; c'est la nature qui le lui conseille, et l'homme qui détruit son semblable est à la nature ce que lui est la peste ou la famine, également envoyées par sa main, laquelle se sert de tous les moyens possibles pour obtenir plus tôt cette matière première de destruction, absolument essentielle à ses ouvrages. Daignons éclairer un instant notre âme du saint flambeau de la philosophie : quelle autre voix que celle de la nature nous suggère les haines personnelles, les vengeances, les guerres, en un mot tous ces motifs de meurtres perpétuels ? Or, si elle nous les conseille, elle en a donc besoin. Comment donc pouvons-nous, d'après cela, nous supposer coupables envers elle, dès que nous ne faisons que suivre ses vues ?

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