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Julien Gracq, Au château d'Argol

Publié le 28/03/2011

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gracq

Parties du programme abordées:    - Le xxe siècle.    - Julien Gracq.    Conseils pratiques: Pour ce commentaire, on s'attachera surtout à l'étude des images — métaphores, comparaisons — et des champs lexicaux, qui contribuent pour une grande part à la création progressive d'une atmosphère fantastique.    Difficulté du sujet: **        Des hauteurs du château d'Argol, Albert contemple la plaine de Storrvan.    L'orage se déchaînait sur Storrvan. De lourds nuages gris aux bord déchiquetés accouraient de l'ouest avec vitesse, frôlant presque la tour qu'ils enveloppaient par moments des écharpes vertigineuses d'une brume blanchâtre. Mais le vent surtout, le vent remplissait l'espace du déchaînement de son poids épouvantable. La nuit était presque entièrement tombée.    Les passées(1) de l'ouragan, comme dans une chevelure fragile, ouvraient de rapides et fugitives tranchées dans la masse des arbres gris qu'elles écartaient comme des herbes, et l'on voyait alors l'espace d'une seconde un sol nu, des rocs noirs, les fissures étroites des ravins. L'ouragan tordait follement cette crinière grise ! Il en venait un bruissement immense ; les troncs, tout à l'heure cachés sous un moutonnement de verdure, étaient dénudés par les secousses du vent; on voyait leurs membres fragiles et gris tendus par l'effort comme un lacis de cordages. Et ils succombaient, ils succombaient, — un craquement sec préludait à la chute, et puis mille craquements s'entendaient d'un coup, une cascade de sons retentissants que couvrait le hurlement de la tempête, et les géants s'engloutissaient. Alors l'averse déchaîna les fraîcheurs glaciales de son déluge comme la volée brutale d'une poignée de cailloux, et la forêt répondit de tout le rebondissement métallique de ses feuilles. Les rocs nus brillèrent comme de dangereuses cuirasses, la gloire(2) liquide et jaunâtre d'un brouillard humide couronna un instant la tête de chaque arbre de la forêt — un instant une bande jaune et lumineuse, merveilleusement translucide, brilla sur l'horizon où chaque arbre découpa en une seconde ses moindres branches, fit luire les pierres brillantes d'eau du parapet, la blonde chevelure d'Albert trempée de pluie, le brouillard liquide et froid qui roulait sur la cime des arbres d'un rayon doré, glacial et presque inhumain, — puis s'éteignit, et la nuit tomba comme un coup de hache.    Julien Gracq, Au château d'Argol, 1938.    (1) Passée: s'emploie pour désigner le chemin habituellement suivi par un animal.    (2) Gloire: dans la peinture religieuse, halo lumineux entourant le visage ou la personne du Christ.    Vous ferez de ce texte un commentaire composé. Vous pourrez étudier par exemple comment un phénomène naturel, prend ici, grâce aux procédés poétiques auxquels recourt le romancier, une dimension fantastique.    Mais ces indications ne sont pas contraignantes et vous avez toute latitude pour organiser le commentaire à votre gré. Vous vous abstiendrez toutefois de présenter une explication linéaire, et de séparer artificiellement le fond de la forme.

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