Histoire de la Revolution francaise, tome 1 les serra dans ses bras, en les nommant ses enfans.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
PALAIS-ROYAL.
Cependant tout s'agitait dans le sein de la capitale, ou une nouvelle autorite venait de s'etablir.
Le meme
mouvement qui avait porte les electeurs a se mettre en action, poussait toutes les classes a en faire autant.
L'assemblee avait ete imitee par l'Hotel-de-Ville, l'Hotel-de-Ville par les districts, et les districts par toutes
les corporations.
Tailleurs, cordonniers, boulangers, domestiques, reunis au Louvre, a la place Louis XV, aux
Champs-Elysees, deliberaient en forme, malgre les defenses reiterees de la municipalite.
Au milieu de ces
mouvemens contraires, l'Hotel-de-Ville, combattu par les districts, inquiete par le Palais-Royal, etait entoure
d'obstacles, et pouvait a peine suffire aux soins de son immense administration.
Il reunissait a lui seul
l'autorite civile, judiciaire et militaire.
Le quartier-general de la milice y etait fixe.
Les juges, dans le premier
moment, incertains sur leurs attributions, lui adressaient les accuses.
Il avait meme la puissance legislative, car
il etait charge de se faire une constitution.
Bailly avait pour cet objet demande a chaque district deux
commissaires qui, sous le nom de representans de la commune, devaient en regler la constitution.
Pour suffire
a tant de soins, les electeurs s'etaient partages en divers comites: l'un, nomme comite des recherches,
s'occupait de la police; l'autre, nomme comite des subsistances, s'occupait des approvisionnemens, tache la
plus difficile et la plus dangereuse de toutes.
Bailly fut oblige de s'en occuper jour et nuit.
Il fallait operer des
achats continuels de ble, le faire moudre ensuite, et puis le porter a Paris a travers les campagnes affamees.
Les convois etaient souvent arretes, et on avait besoin de detachemens nombreux pour empecher les pillages
sur la route et dans les marches.
Quoique l'etat vendit les bles a perte, afin que les boulangers pussent
rabaisser le prix du pain, la multitude n'etait pas satisfaite: il fallait toujours diminuer ce prix, et la disette de
Paris augmentait par cette diminution meme, parce que les campagnes couraient s'y approvisionner.
La crainte
du lendemain portait chacun a se pourvoir abondamment, et ce qui s'accumulait dans les mains des uns
manquait aux autres.
C'est la confiance qui hate les travaux du commerce, qui fait arriver les denrees, et qui
rend leur distribution egale et facile; mais Quand la confiance disparait, l'activite commerciale cesse; les
objets n'arrivant plus au-devant des besoins, ces besoins s'irritent, ajoutent la confusion a la disette, et
empechent la bonne distribution du peu qui reste.
Le soin des subsistances etait donc le plus penible de tous.
De cruels soucis devoraient Bailly et le comite.
Tout le travail du jour suffisait a peine au besoin du jour, et il
fallait recommencer le lendemain avec les memes inquietudes.
Lafayette, commandant de la milice bourgeoise[1], n'avait pas moins de peines.
Il avait incorpore dans cette
milice les gardes-francaises devoues a la revolution, un certain nombre de Suisses, et une grande quantite de
soldats qui desertaient les regimens dans l'espoir d'une solde plus forte.
Le roi en avait lui-meme donne
l'autorisation.
Ces troupes reunies composerent ce qu'on appela les compagnies du centre.
La milice prit le
nom de garde nationale, revetit l'uniforme, et ajouta aux deux couleurs rouge et bleue de la cocarde parisienne
la couleur blanche, qui etait celle du roi.
C'est la cette cocarde tricolore dont Lafayette predit les destinees en
annoncant qu'elle ferait le tour du monde.
C'est a la tete de cette troupe que Lafayette s'efforca pendant deux annees consecutives de maintenir la
tranquillite publique, et de faire executer les lois que l'assemblee decretait chaque jour.
Lafayette, issu d'une
famille ancienne et demeuree pure au milieu de la corruption des grands, doue d'un esprit droit, d'une ame
ferme, amoureux de la vraie gloire, s'etait ennuye des frivolites de la cour et de la discipline pedantesque de
nos armees.
Sa patrie ne lui offrant rien de noble a tenter, il se decida pour l'entreprise la plus genereuse du
siecle, et il partit pour l'Amerique le lendemain du jour ou l'on repandait en Europe qu'elle etait soumise.
Il y
combattit a cote de Washington, et decida l'affranchissement du Nouveau-Monde par l'alliance dans la
France.
Revenu dans son pays avec un nom europeen, accueilli a la cour comme une nouveaute, il s'y montra
simple et libre comme un Americain.
Lorsque la philosophie, qui n'avait ete pour des nobles oisifs qu'un jeu
d'esprit, exigea de leur part des sacrifices, Lafayette presque seul persista dans ses opinions, demanda les
etats-generaux, contribua puissamment a la reunion des ordres, et fut nomme, en recompense,
commandant-general de la garde nationale.
Lafayette n'avait pas les passions et le genie qui font souvent
abuser de la puissance: avec une ame egale, un esprit fin, un systeme de desinteressement invariable, il etait
surtout propre au role que les circonstances lui avaient assigne, celui de faire executer les lois.
Adore de ses Histoire de la Revolution francaise, tome 1
CHAPITRE III.
TRAVAUX DE LA MUNICIPALITE DE PARIS.\24LAFAYETTE COMMANDANT DE LA GARDE NATIONALE; SON CARACTERE ET SON ROLE DANS LA REVOLUTION.\24MASSACRE DE FOULON ET DE BERTHIER.\24RETOUR DE NECKER.\24SITUATION ET DIVISION DES PARTIS ET DE LEURS CHEFS.\24MIRABEAU; SON CARACTERE, SON PROJET ET SON GENIE.
\24LES BRIGANDS.\24TROUBLES DANS LES PROVINCES ET LES CAMPAGNES.\24NUIT DU 4 AOUT.\24ABOLITION DES DROITS FEODAUX ET DE TOUS LES PRIVILEGES.
\24DECLARATION DES DROITS DE L'HOMME.\24DISCUSSION SUR LA CONSTITUTION ET SUR LE veto.\24AGITATION A PARIS.
RASSEMBLEMENT TUMULTUEUX AU PALAIS-ROYAL.
39.
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