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FONDEMENTS DE LA MÉTAPHYSIQUE DES MOEURS : PREMIÈRE SECTION

Publié le 28/06/2012

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Seule la bonne volonté a une valeur absolue

De tout ce qu'il est possible de concevoir en ce monde, ou même hors de ce monde, il n'y a rien qui puisse sans restriction être regardé comme bon absolument, excepté une BONNE VOLONTÉ. L'intelligence, le don de saisir les ressemblances des choses, la faculté de discerner le particulier pour en juger, ainsi que les autres talents de l'esprit, quel que soit le nom qu'on leur donne, ou encore le courage, la décision, la persévérance dans les oeuvres entreprises, qualités du tempérament, sont évidemment à de nombreux points de vue des choses bonnes et désirables; mais elles peuvent devenir mauvaises et dangereuses si la volonté qui doit faire usage de ces dons de la nature et dont les dispositions particulières s'appellent le caractère, n'est point une bonne volonté. Il faut dire la même chose des dons de la fortune...

« PREMIÈRE SECTION forme en présomption, s'il n'y a pas une bonne volonté pour modérer l'influence que ces avantages ont sur notre âme, et re­ dresser en même temps le principe de l'action, en le tournant vers le bien général; outre qu'un spectateur raisonnable et impar­ tial ne saurait jamais éprouver une véritable satisfaction à voir que tout puisse réussir perpétuellement à une personne que ne relève aucun trait de vraie bonne volonté, de telle sorte que la bonne volonté paraît être la condition indispensable qui nous rend dignes d'être heureux.

Certaines qualités peuvent favoriser cette bonne volonté et faciliter son œuvre, qui cependant n'ont pas en elles-mêmes de valeur absolue, mais supposent au contraire une bonne volonté.

C'est là une condition qui modère l'estime qu'on leur témoigne du reste justement, et qui ne permet pas de les tenir pour bonnes absolument.

La modération dans les affections et les passions, la maîtrise de soi, le pouvoir de réfléchir avec sang-froid, ne sont pas seulement des choses bonnes à bien des égards, mais elles semblent constituer une partie même de la valeur intrinsèque de la personne; toutefois il s'en faut bien qu'on puisse les regarder comme bonnes sans aucune restriction (malgré la valeur absolue que leur attribuaient les anciens).

Car sans une bonne volonté elles peuvent devenir très mauvaises; le sang-froid d'un bandit ne le rend pas seulement plus dangereux; ille fait paraître à nos yeux plus repoussant encore que nous ne le jugerions sans cela.

Ce n'est pas par ses productions et ses succès que la bonne volonté est ce qu'elle est; ce n'est pas par sa facilité à atteindre un but proposé, mais c'est seulement par le vouloir; c'est-à-dire qu'elle est bonne en soi, et que, considérée en elle-même, elle doit incontestablement être estimée de beaucoup supérieure à tout ce qui pourrait être fait par elle en faveur de quelque incli­ nation, ou même, si l'on veut, de l'ensemble des inclinations.

Quand bien même, par la défaveur du sort ou par l'avarice d'une nature marâtre, cette volonté serait absolument dépourvue du pouvoir de faire aboutir ses desseins; alors même que ses plus grands efforts resteraient stériles; alors même qu'il n'y aurait plus que la bonne volonté toute seule (j'entends par là, non pas un simple vœu, mais l'usage de tous les moyens dont nous pou­ vons disposer), elle n'en brillerait pas moins, comme une pierre précieuse, de son éclat propre, comme une chose qui possède en soi sa valeur.

L'utilité ou l'inutilité ne peuvent ni accroître ni diminuer cette valeur.

L'utilité ne serait pour ainsi dire que la monture qui permet de mieux manier le joyau dans l'usage cou· rant, ou qui est propre à attirer sur lui l'attention de ceux qui ne sont pas connaisseurs, mais elle ne saurait avoir pour résultat de le recommander aux connaisseurs, ni d'en déterminer la valeur.

I7. »

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