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enjoué.

Publié le 15/12/2013

Extrait du document

enjoué. - Qu'est-ce donc que vous pouvez être alors ; à quoi puis-je vous comparer ? Où serait-il possible de rencontrer une femme qui vous ressemblât ? Où pourrais-je trouver une aussi rare combinaison d'excellence et de beauté ? Où pourrais-je aller chercher... Oh ! » Ici M. Tupman s'arrêta et serra la blanche main qui tenait l'anse de l'heureux arrosoir. La timide héroïne détourna un peu la tête. « Les hommes sont de si grands trompeurs, objectat-elle faiblement. - Oui, vous avez raison, exclama M. Tupman ; mais ils ne le sont pas tous... Il existe au moins un être qui ne changera jamais ! Un être qui serait heureux de dévouer toute son existence à votre bonheur ! Un être qui ne vit que dans vos yeux, qui ne respire que dans votre sourire ! Un être qui ne supporte que pour vous seule le pesant fardeau de la vie ! - Si l'on pouvait trouver un être semblable... - Mais il est trouvé ! interrompit l'ardent Tupman. Il est trouvé ! Il est ici, miss Wardle ! Et avant que la dame pût deviner ses intentions, il se prosterna à ses pieds. - Monsieur Tupman, levez-vous ! s'écria Rachel. - Jamais ! répliqua-t-il bravement. Oh ! Rachel ! Il saisit sa main complaisante, qui laissa tomber l'arrosoir, et il la pressa sur ses lèvres. Oh ! Rachel ! dites que vous m'aimez ! - Monsieur Tupman, murmura la ci-devant jeune personne en tournant la tête, j'ose à peine vous répondre... mais... vous ne m'êtes pas tout à fait indifférent. » Aussitôt que M. Tupman eut entendu ce doux aveu, il s'empressa de faire ce que lui inspirait son émotion enthousiaste, et ce que tout le monde fait dans les mêmes circonstances (à ce que nous croyons du moins, car nous sommes peu familiarisé avec ces sortes de choses), il se leva précipitamment, jeta ses bras autour du cou de la tendre demoiselle, et imprima sur ses lèvres de nombreux baisers. Après une résistance convenable, elle se soumit à les recevoir si passivement qu'on ne saurait dire combien M. Tupman lui en aurait donné, si elle n'avait pas tressailli tout d'un coup, sans aucune affectation, cette fois, et ne s'était pas écriée d'une voix effrayée : « Monsieur Tupman ! on nous voit ! Nous sommes perdus ! » M. Tupman se retourna. Le gros joufflu était derrière lui, parfaitement immobile, braquant sur le berceau ses gros yeux circulaires, mais avec un visage si dénué d'expression, que le plus habile physionomiste n'aurait pu y découvrir de traces d'étonnement, de curiosité, ni d'aucune des passions connues qui agitent le coeur humain. M. Tupman regarda le gros joufflu, et le gros joufflu regarda M. Tupman ; et plus M. Tupman étudiait la complète torpeur de sa physionomie, plus il demeurait convaincu que le somnolent jeune homme n'avait pas vu ou n'avait pas compris ce qui s'était passé. Dans cette persuasion il lui dit avec une grande fermeté : « Que venez-vous faire ici ? - Le souper est prêt, monsieur, répliqua Joe sans hésiter. - Arrivez-vous à l'instant ? lui demanda M. Tupman, en le transperçant du regard. - À l'instant, » répondit-il. M. Tupman le considéra de nouveau très-fixement, mais ses yeux ne clignèrent pas ; il n'y avait pas un pli sur son visage. M. Tupman prit le bras de la tante demoiselle, et marcha avec elle vers la maison ; le jeune homme les suivit par derrière. « Il ne sait rien de ce qui vient de se passer, dit tout bas l'heureux pickwickien. - Rien, » répliqua la dame. Un bruit se fit entendre derrière eux, semblable à un ricanement étouffé. M. Tupman se retourna vivement. Non... ce ne pouvait pas être le gros joufflu : on ne distinguait pas sur son visage le moindre rayon de gaieté ; on n'y voyait que de la gloutonnerie. « Il dormait sans doute tout en marchant, chuchota M. Tupman. - Je n'en ai pas le moindre doute, » répartit la tante demoiselle ; et alors ils se mirent à rire tous les deux. Ils se trompaient, cependant. Une fois en sa vie le léthargique jeune homme n'était pas endormi. Il était éveillé, bien éveillé, et il avait tout remarqué. Le souper se passa sans que personne fît aucun effort pour rendre la conversation générale. La vieille lady était allée se coucher ; Isabella Wardle se dévouait exclusivement à M. Trundle ; les attentions de sa tante étaient réservées pour M. Tupman, et les pensées d'Emily paraissaient occupées de quelque objet lointain ; peut-être étaient-elles errantes autour de M. Snodgrass. Onze heures, minuit, une heure avaient sonné successivement, et les gentlemen n'étaient pas revenus de Muggleton. La consternation était peinte sur tous les visages. Avaient-ils été attaqués et volés ? Fallait-il envoyer des hommes et des lanternes sur tous les chemins qu'ils avaient pu prendre ? Fallait-il... Écoutez... Les voilà ! - Qui peut les avoir tant attardés ? - Une voix étrangère ? à qui peut-elle appartenir ? Tout le monde se précipita dans la cuisine où les truands étaient débarqués, et l'on reconnut au premier coup d'oeil le véritable état des choses. M. Pickwick, avec ses mains dans ses poches et son chapeau complètement enfoncé sur un oeil, était appuyé contre le buffet, et, balançant sa tête de droite à gauche, produisait une constante succession de sourires, les plus doux, les plus bienveillants du monde, mais sans aucune cause ou prétexte appréciable. Le vieux M. Wardle, dont le visage était prodigieusement enflammé, serrait les mains d'un visiteur étranger en bégayant des protestations d'amitié éternelle. M. Winkle, se soutenant à la boîte d'une horloge à poids, appelait, d'une voix faible, les vengeances du ciel sur tout membre de la famille qui lui conseillerait d'aller se coucher. Enfin M. Snodgrass s'était affaissé sur une chaise, et chaque trait de son visage expressif portait l'empreinte de la misère la plus abjecte et la plus profonde que se puisse figurer l'esprit humain. « Est-il arrivé quelque chose ? demandèrent les trois dames. - Rien du tout, répondit M. Pickwick. Nous... sommes... tous... en bon état... Dites donc... Wardle... nous sommes... tous... en bon état... N'est-ce pas ? - Un peu, répliqua le joyeux hôte. Mes chéries... voici mon ami, M. Jingle... l'ami de M. Pickwick... M. Jingle... venu... pour une petite visite... - Monsieur, demanda Emily avec anxiété, est-il arrivé quelque chose à M. Snodgrass ? - Rien du tout, madame, répliqua l'étranger. Dîner de Club, - joyeuse compagnie, - chansons admirables, - vieux porto, - vin de Bordeaux, - bon, - très-bon. - C'est le vin, madame, le vin. - Ce n'est pas le vin, bégaya M. Snodgrass d'un ton grave. C'est le saumon. (Remarquez qu'en pareille circonstance ce n'est jamais le vin.) - Ne feraient-ils pas mieux d'aller se coucher, madame ? demanda Emma. Deux des gens pourraient porter ces messieurs dans leur chambre. - Je n'irai pas me coucher ! s'écria M. Winkle avec fermeté. - Aucun homme vivant ne me portera ! dit intrépidement M. Pickwick ; et il continua de sourire comme auparavant. - Hourra ! balbutia faiblement M. Winkle. - Hourra ! répéta M. Pickwick, et prenant son chapeau il l'aplatit sur la terre, saisit ses lunettes et les fit voler à travers la cuisine ; puis, ayant accompli cette heureuse plaisanterie, il recommença à rire comme un insensé. - Apportez-nous une... une autre... bouteille ! cria M. Winkle en commençant sur un ton trèsélevé et finissant sur un ton très-bas. Mais peu après sa tête tomba sur sa poitrine ; il murmura encore son invincible détermination de ne pas s'aller coucher, bégaya un regret sanguinaire de n'avoir pas, dans la matinée, fait l'affaire du vieux Tupman, puis il s'endormit profondément. En cet état il fut transporté dans sa chambre par deux jeunes géants, sous la surveillance immédiate du gros joufflu. Bientôt après M. Snodgrass confia sa personne aux soins protecteurs du jeune somnambule. M. Pickwick accepta le bras de M. Tupman et disparut tranquillement,

« les deux. Ils se trompaient, cependant.Unefoisensavie leléthargique jeunehomme n’étaitpas endormi.

Ilétait éveillé, bienéveillé, etilavait toutremarqué. Le souper sepassa sansquepersonne fîtaucun effortpourrendre laconversation générale.La vieille ladyétait allée secoucher ; IsabellaWardlesedévouait exclusivement àM. Trundle ; les attentions desatante étaient réservées pourM. Tupman, etles pensées d’Emilyparaissaient occupées dequelque objetlointain ; peut-être étaient-elles errantesautourdeM. Snodgrass. Onze heures, minuit,uneheure avaient sonnésuccessivement, etles gentlemen n’étaientpas revenus deMuggleton.

Laconsternation étaitpeinte surtous lesvisages.

Avaient-ils été attaqués etvolés ? Fallait-il envoyer deshommes etdes lanternes surtous leschemins qu’ils avaient puprendre ? Fallait-il…Écoutez…Lesvoilà ! –Qui peut lesavoir tantattardés ? –Une voix étrangère ? àqui peut-elle appartenir ? Toutlemonde seprécipita danslacuisine oùles truands étaientdébarqués, etl’on reconnut aupremier coupd’œil levéritable étatdeschoses. M. Pickwick, avecsesmains danssespoches etson chapeau complètement enfoncésurunœil, était appuyé contrelebuffet, et,balançant satête dedroite àgauche, produisait uneconstante succession desourires, lesplus doux, lesplus bienveillants dumonde, maissansaucune cause ou prétexte appréciable.

Levieux M. Wardle, dontlevisage étaitprodigieusement enflammé, serrait lesmains d’unvisiteur étranger enbégayant desprotestations d’amitiééternelle. M. Winkle, sesoutenant àla boîte d’une horloge àpoids, appelait, d’unevoixfaible, les vengeances duciel surtout membre delafamille quiluiconseillerait d’allersecoucher.

Enfin M. Snodgrass s’étaitaffaissé surune chaise, etchaque traitdeson visage expressif portait l’empreinte delamisère laplus abjecte etlaplus profonde quesepuisse figurer l’esprit humain.

« Est-il arrivéquelque chose ?demandèrent lestrois dames. – Rien dutout, répondit M. Pickwick.

Nous…sommes… tous…enbon état… Ditesdonc… Wardle… noussommes… tous…enbon état… N’est-ce pas ? – Un peu, répliqua lejoyeux hôte.Meschéries… voicimonami,M. Jingle… l’amide M. Pickwick… M. Jingle…venu…pourunepetite visite… – Monsieur, demandaEmilyavecanxiété, est-ilarrivé quelque choseàM. Snodgrass ? – Rien dutout, madame, répliqual’étranger.

DînerdeClub, –joyeuse compagnie, –chansons admirables, –vieux porto, –vin deBordeaux, –bon, –très-bon.

–C’est levin, madame, levin. – Ce n’est paslevin, bégaya M. Snodgrass d’untongrave.

C’estlesaumon.

(Remarquez qu’en pareille circonstance cen’est jamais levin.) – Ne feraient-ils pasmieux d’aller secoucher, madame ? demandaEmma.Deuxdesgens pourraient portercesmessieurs dansleurchambre. – Je n’irai pasmecoucher ! s’écriaM. Winkle avecfermeté. – Aucun homme vivantneme portera ! ditintrépidement M. Pickwick ;etilcontinua desourire comme auparavant. – Hourra ! balbutiafaiblement M. Winkle. – Hourra ! répétaM. Pickwick, etprenant sonchapeau ill’aplatit surlaterre, saisitseslunettes et les fitvoler àtravers lacuisine ; puis,ayant accompli cetteheureuse plaisanterie, il recommença àrire comme uninsensé. – Apportez-nous une…uneautre… bouteille ! criaM. Winkle encommençant surunton très- élevé etfinissant surunton très-bas.

Maispeuaprès satête tomba sursapoitrine ; ilmurmura encore soninvincible détermination denepas s’aller coucher, bégayaunregret sanguinaire de n’avoir pas,dans lamatinée, fait l’affaire duvieux Tupman , puis ils’endormit profondément. En cet état ilfut transporté danssachambre pardeux jeunes géants, souslasurveillance immédiate dugros joufflu.

Bientôt aprèsM. Snodgrass confiasapersonne auxsoins protecteurs du jeune somnambule.

M. Pickwickacceptalebras deM. Tupman etdisparut tranquillement,. »

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