Contes d'une grand-mere vieux chapeaux, varechs gluants, débris d'embarcation couverts d'anatifes gâtés et infects, chapelets de petites moules, cadavres de méduses sur lesquels le pied glisse à chaque pas.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
Terrassé, moi! Ne serait-ce pas plutôt...? il était fort, le sauterne! Vous vouliez tout casser chez moi! Mais,
puisque nous ne nous souvenons pas bien ni l'un ni l'autre, achevons d'oublier nos discordes en déjeunant
ensemble de bonne amitié.
Je suis venu ici pour vous prier d'accepter le repas que vous m'avez forcé
d'accepter hier.
Je vis alors que le gnome était un aimable homme, car il me fit servir un vrai festin où je m'observai sagement
à l'endroit des vins et où il ne fut plus question d'huîtres que pour les déguster.
Je repartais à midi, il
m'accompagna jusqu'au chemin de fer en me laissant sa carte: il s'appelait tout bonnement M.
Gaume.
LA FÉE AUX GROS YEUX
Elsie avait une gouvernante irlandaise fort singulière.
C'était la meilleure personne qui fût au monde, mais
quelques animaux lui étaient antipathiques à ce point qu'elle entrait dans de véritables fureurs contre eux.
Si
une chauve-souris pénétrait le soir dans l'appartement, elle faisait des cris ridicules et s'indignait contre les
personnes qui ne couraient pas sus à la pauvre bête.
Comme beaucoup de gens éprouvent de la répugnance
pour les chauves-souris, on n'eût pas fait grande attention à la sienne, si elle ne se fût étendue à de charmants
oiseaux, les fauvettes, les rouges-gorges, les hirondelles et autres insectivores, sans en excepter les rossignols,
qu'elle traitait de cruelles bêtes.
Elle s'appelait miss Barbara ***, mais on lui avait donné le surnom de fée aux
gros yeux; fée, parce qu'elle était très-savante et très-mystérieuse; aux gros yeux, parce qu'elle avait
d'énormes yeux clairs saillants et bombés, que la malicieuse Elsie comparait à des bouchons de carafe.
Elsie ne détestait pourtant pas sa gouvernante, qui était pour elle l'indulgence et la patience mêmes:
seulement, elle s'amusait de ses bizarreries et surtout de sa prétention à voir mieux que les autres, bien qu'elle
eût pu gagner le grand prix de myopie au concours de la conscription.
Elle ne se doutait pas de la présence des
objets, à moins qu'elle ne les touchât avec son nez, qui par malheur était des plus courts.
Un jour qu'elle avait donné du front dans une porte à demi ouverte, la mère d'Elsie lui avait dit:
Vraiment, à quelque jour, vous vous ferez grand mal! Je vous assure, ma chère Barbara, que vous devriez
porter des lunettes.
Barbara lui avait répondu avec vivacité:
Des lunettes, moi? Jamais! je craindrais de me gâter la vue!
Et, comme on essayait de lui faire comprendre que sa vue ne pouvait pas devenir plus mauvaise, elle avait
répliqué, sur un ton de conviction triomphante, qu'elle ne changerait avec qui que ce soit les trésors de sa
vision.
Elsie voyait les plus petits objets comme les autres avec les loupes les plus fortes; ses yeux étaient
deux lentilles de microscope qui lui révélaient à chaque instant des merveilles inappréciables aux autres.
Le
fait est qu'elle comptait les fils de la plus fine batiste et les mailles des tissus les plus déliés, là où Elsie, qui
avait ce qu'on appelle de bons yeux, ne voyait absolument rien.
Longtemps on l'avait surnommée miss Frog (grenouille), et puis on l'appela miss Maybug (hanneton), parce
qu'elle se cognait partout; enfin, le nom de fée aux gros yeux prévalut, parce qu'elle était trop instruite et trop
intelligente pour être comparée à une bête, et aussi parce que tout le monde, en voyant les découpures et les
broderies merveilleuses qu'elle savait faire, disait:
C'est une véritable fée!
Barbara ne semblait pas indifférente à ce compliment, et elle avait coutume de répondre: Contes d'une grand-mere
LA FÉE AUX GROS YEUX 70.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Contes d'une grand-mere Vous connaissez cet ami, mes chères petites, vous savez qu'il est fantaisiste, et que, quand il raconte, son imagination lui fait dépasser le vraisemblable.
- Contes d'une grand-mere Elsie s'enfuit à travers les plates-bandes, en proie à une terreur invincible.
- Contes d'une grand-mere --Qui sait?
- Le personnage de GRAND-MERE (la) de Marcel Proust
- Contes de la bécasse l'amour vrai, le grand amour, ne pouvait