Contes de la bécasse "J' te dis qu'ça : qu'i z'y viennent !
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
Elle attendit une heure, deux heures, jusqu'au jour.
Son mari ne rentra pas.
Alors elle perdit la tête, appela,
raconta la fureur de Jean et sa course après les braconniers.
Aussitôt les valets, les charretiers, les gars partirent à la recherche du maître.
On le retrouva à deux lieues de la ferme, ficelé des pieds à la tête, à moitié mort de fureur, son fusil tordu, sa
culotte à l'envers, avec trois lièvres trépassés autour du cou et une pancarte sur la poitrine :
"Qui va à la chasse, perd sa place."
Et, plus tard, quand il racontait cette nuit d'épousailles, il ajoutait : "Oh ! pour une farce c'était une bonne
farce.
Ils m'ont pris dans un collet comme un lapin, les salauds, et ils m'ont caché la tête dans un sac.
Mais si
je les tâte un jour, gare à eux !"
Et voilà comment on s'amuse, les jours de noce, au pays normand.
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LES SABOTS
A Léon Fontaine.
Le vieux curé bredouillait les derniers mots de son sermon au-dessus des bonnets blancs des paysannes et
des cheveux rudes ou pommadés des paysans.
Les grands paniers des fermières venues de loin pour la messe
étaient posés à terre à côté d'elles ; et la lourde chaleur d'un jour de juillet dégageait de tout le monde une
odeur de bétail, un fumet de troupeau.
Les voix des coqs entraient par la grande porte ouverte, et aussi les
meuglements des vaches couchées dans un champ voisin.
Parfois un souffle d'air chargé d'arômes des champs
s'engouffrait sous le portail et, en soulevant sur son passage les longs rubans des coiffures, il allait faire
vaciller sur l'autel les petites flammes jaunes au bout des cierges...
"Comme le désire le Bon Dieu.
Ainsi
soit-il !" prononçait le prêtre.
Puis il se tut, ouvrit un livre et se mit, comme chaque semaine, à recommander
à ses ouailles les petites affaires intimes de la commune.
C'était un vieil homme à cheveux blancs qui
administrait la paroisse depuis bientôt quarante ans, et le prône lui servait pour communiquer familièrement
avec tout son monde.
Il reprit : "Je recommande à vos prières Désiré Vallin, qu'est bien malade et aussi la Paumelle qui ne se remet
pas vite de ses couches."
Il ne savait plus ; il cherchait les bouts de papier posés dans un bréviaire.
Il en retrouva deux enfin, et
continua : "Il ne faut pas que les garçons et les filles viennent comme ça, le soir, dans le cimetière, ou bien je
préviendrai le garde champêtre.\24\24M.
Césaire Omont voudrait bien trouver une jeune fille honnête comme
servante." Il réfléchit encore quelques secondes, puis ajouta : "C'est tout, mes frères, c'est la grâce que je vous
souhaite, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit."
Et il descendit de la chaire pour terminer sa messe.
Quand les Malandain furent rentrés dans leur chaumière, la dernière du hameau de la Sablière, sur la route de
Fourville, le père, un vieux petit paysan sec et ridé, s'assit devant la table, pendant que sa femme décrochait la
marmite et que sa fille Adélaïde prenait dans le buffet les verres et les assiettes, et il dit : "Ça s'rait p't-être
bon, c'te place chez maîtr' Omont, vu que le v'là veuf, que sa bru l'aime pas, qu'il est seul et qu'il a d' quoi.
J'
ferions p't-être ben d'y envoyer Adélaïde." Contes de la bécasse
Contes de la bécasse 26.
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