Contes de la bécasse "Cent francs par mois, c'est point suffisant pour nous priver du p'tit ; ça travaillera dans quéqu' z'ans c't' éfant ; i nous faut cent vingt francs.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
"C'est-i té, m'n éfant ? C'est-i té, m'n éfant ?"
Il la prit dans ses bras et l'embrassa, en répétant : "Bonjour, maman." Tandis que le vieux, tout tremblant,
disait, de son ton calme qu'il ne perdait jamais : "Te v'là-t'il revenu Jean ?" Comme s'il l'avait vu un mois
auparavant.
Et, quand ils se furent reconnus, les parents voulurent tout de suite sortir le fieu dans le pays pour le montrer.
On le conduisit chez le maire, chez l'adjoint, chez le curé, chez l'instituteur.
Charlot, debout sur le seuil de sa chaumière, le regardait passer.
Le soir, au souper, il dit aux vieux :
"Faut-il qu' vous ayez été sots pour laisser prendre le p'tit aux Vallin !"
Sa mère répondit obstinément :
"J' voulions point vendre not' éfant !"
Le père ne disait rien.
Le fils reprit :
"C'est-il pas malheureux d'être sacrifié comme ça !"
Alors le père Tuvache articula d'un ton coléreux :
"Vas-tu pas nous r'procher d' t'avoir gardé ?"
Et le jeune homme, brutalement :
"Oui, j' vous le r'proche, que vous n'êtes que des niants.
Des parents comme vous ca fait l' malheur des éfants.
Qu' vous mériteriez que j' vous quitte."
La bonne femme pleurait dans son assiette.
Elle gémit tout en avalant des cuillerées de soupe dont elle
répandait la moitié :
"Tuez-vous donc pour élever d's éfants !"
Alors le gars, rudement :
"J'aimerais mieux n'être point né que d'être c' que j' suis.
Quand j'ai vu l'autre, tantôt, mon sang n'a fait qu'un
tour.
Je m' suis dit : - v'là c' que j' serais maintenant !"
Il se leva.
"Tenez, j' sens bien que je ferai mieux de n' pas rester ici, parce que j' vous le reprocherais du matin au soir, et
que j' vous ferais une vie d' misère.
Ça, voyez-vous, j' vous l' pardonnerai jamais !"
Les deux vieux se taisaient, atterrés, larmoyants ! Contes de la bécasse
Contes de la bécasse 50.
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