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Claudel, le Soulier de satin (extrait) - anthologie du théâtre.

Publié le 14/05/2013

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Claudel, le Soulier de satin (extrait) - anthologie du théâtre. « Le pire n'est pas toujours sûr «, dit aussi le titre du Soulier de satin. Pourtant, le thème du sacrifice est omniprésent dans ce drame théologique en quatre journées où Claudel, tressant les intrigues, célèbre, à travers le destin du conquistador Rodrigue, la vie comme une quête spirituelle où se réaccomplit la Création divine. C'est, en effet, le renoncement et ses propriétés rédemptrices qui nourrissent la pièce : conduits par la Grâce qui les tenaille, Rodrigue et son amante Prouhèze se débattent contre le péché que leur union représente aux yeux de Dieu, mais aussi de ceux du juge Pelage et du roi d'Espagne. Le Soulier de satin de Paul Claudel (troisième journée, scène 10) LE VICE-ROI [...] Rappelez-moi donc cette chanson qu'ils chantaient tous ensemble et que j'aimais tant. DOÑA ISABEL, chantant : Sur la plaine de l'Océan Vers les Quatre-vingts Î-les Je m'avance en ramant Ta ra ra ta ta ta ! Ta ra ra ta ta ta ! Frappant sur le bois de la guitare avec le poing. L'orchestre qui s'était mis à accompagner en sourdine continue tout seul quelques moments puis s'arrête tout à coup. LE VICE-ROI Ah ! moi aussi sur la plaine de l'Océan vers les Quatre-vingts Îles Quand est-ce que je me mettrai en route ? DOÑA ISABEL Quoi, Monseigneur, seriez-vous las de votre Amérique ? LE SECRÉTAIRE Voilà plus d'un jour déjà que Son Altesse et moi nous sommes un peu las de notre Amérique, comme vous dites. DOÑA ISABEL Vous ai-je pas entendu répéter souvent, alors que vous bâtissiez ce palais, maintenant si tristement endommagé,
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« Ma destinée sans doute. Et de temps en temps il me favorise de quelque réflexion et annotation marginale. DOÑA ISABEL Vous ne m’aimez pas. LE SECRÉTAIRE , avec un cri aigu. Hi ! ma parole, vous allez me faire faire des fautes ! J’allais écrire : Vous ne m’aimez pas, sur l’enveloppe. Monsieur le Corregidor Ruiz Zeballos, à Vounemémépaz. Ce n’est pas un pays pour un corregidor. Je ne sais si Votre Altesse s’est aperçue à quel point cette dame ici présente est éprise de nous.

Une complaisance de cœur.

Un tendre sentiment. Est-ce Don Rodrigue qu’elle aime ? est-ce le Vice-Roi ? Pas moyen de le savoir. On intéresse facilement ces dames un peu fortes qui commencent à prendre de l’âge. Un peu forte, mais encore jolie. DOÑA ISABEL , chantant à voix très basse : Oubliée… Continué par une flûte aiguë sur une seule note decrescendo ppp. LE VICE -ROI , les yeux baissés, presque indistinct. Non, non, mon cher amour, je ne vous ai pas oubliée ! DOÑA ISABEL Ah ! je savais bien que je saurais trouver le mot qui fait que votre cœur tressaille ! LE SECRÉTAIRE Vous ne trouverez son cœur que par la porte du souvenir. DOÑA ISABEL Pour me faire entendre il suffit que je prenne la voix d’une autre. LE VICE -ROI Achevez.

Je veux entendre la suite. DOÑA ISABEL J’ai oublié. (Quelques notes sur la guitare.

Elle chante :) J’ai oublié. (Elle parle :) Je ne sais plus.

J’ai oublié.

Je me suis oubliée moi-même. (Elle chante :) Depuis que tu n’es plus avec moi je me suis oubliée moi-même ! Musique dans le mur pianissimo et tout à fait cacophonique.

Elle se tait, un instrument après l’autre. LE VICE -ROI J’aime la manière dont chante notre Isabel, ce ne sont pas des notes sur des lignes, ainsi dans la forêt chante cet oiseau qu’on appelle rialejo ! Et j’aime aussi ce petit tapage dans le mur qui continue une fois qu’elle a fini. Ainsi quand on lance une pierre dans un fourré on entend les autres pierres qui se mettent en branle et toutes sortes de choses ailées qui s’envolent.. »

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