Charles Nodier (1780-1844) écrit en 1827, dans une poésie sur le style : Le simple, c'est le beau que j'aime. Je donnerais un long poème Pour un cri du cœur que j'entends. En vain une muse fardée S'enlumine d'or et d'azur, Le naturel est bien plus sûr. Le mot doit mûrir sur l'idée Et puis tomber comme un fruit mûr. Pouvez-vous citer des poésies d'auteurs contemporains de Nodier qui justifient ses préférences ?
Publié le 14/03/2011
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Les vers de Nodier sont l'éloge et de la simplicité du fond et de la simplicité du style (dans les deux derniers vers). Pour discuter son jugement, la meilleure méthode est de commencer par mettre à part les cas où il a incontestablement raison; il y a des écrivains et des écoles qui ont certainement « fardé « leur muse avec excès; ce sont par exemple les Précieux et Précieuses ou certains romantiques, certaines œuvres romantiques. Mais si l'on peut être d'accord sur ces erreurs de goût, il y a beaucoup de chefs-d'œuvre qui ne sont pas exactement simples, comme il y en a d'autres dont le charme tient à une simplicité harmonieuse. Simples, Racine, La Fontaine, les Bucoliques de Chénier, les Méditations de Lamartine, Pauca meae de Victor Hugo, etc., ou même les Confessions de Rousseau. Mais il n'y a pas la même simplicité ni dans Corneille, ni dans Molière, ni dans la Nouvelle Héloïse, ni dans les Contes de Voltaire, ni surtout dans Atala, René, les Destinées de Vigny, l'ensemble des Contemplations, la Légende des siècles. Il y a évidemment des profondeurs de pensée, des puissances d'imagination, des bouleversements du cœur qui ne peuvent pas donner une impression de simplicité. L'écrivain peut les exprimer avec sincérité, naturel, mais ce naturel même n'est jamais simple. Choisir entre ces œuvres profondes, intenses, puissantes, et des œuvres plus simples ne peut être qu'affaire de goût.
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