Chapitre I La vallée de la Salinas est en Californie du Nord.
Publié le 30/10/2013
Extrait du document
«
inimaginable.
Desatolls depavots émergeaient çaetlà, d’une couleur brûlante.
Sil’or en
fondant émettait desvapeurs etque l’on puisse lesrecueillir, peut-êtreauraient-elles la
couleur dupavot deCalifornie.
Ensuitevenaitlasaison delamoutarde jaune.Elleétait
si haute lorsque mongrand-père arrivadanslaVallée qu’unhomme àcheval la
dépassait seulement delatête.
Surlesterres hautes, l’herbeétaitsemée deboutons d’or,
de primevères etde pensées jaunesàcœur noir.Unpeu plus tard, onvoyait apparaître
des bouquets decastillèje rougeetjaune.
C’était laflore desgrands espaces exposés au
soleil.
Sous leschênes verts,danslalumière tamisée, lescheveux deVénus embaumaient.
Sur
les bords desruisseaux pendaient desbouquets decétéracs.
Etpuis, ilyavait les
jacinthes, petiteslanternes d’unblanc ivoire, fleursmagiques etrares dontl’aspect
même éveillait l’idéedepéché.
L’enfant quientrouvait unesesentait magnifié, isolédu
monde pourtoute lajournée.
Quand venaitlemois dejuin, l’herbe s’étiolait etlaVallée tournait aubrun, maisun
brun oùn’entrait quedel’or, dusafran etdu rouge.
Alors,jusqu’aux prochaines pluies,
la terre sedesséchait etles cours d’eautarissaient.
Descraquelures apparaissaient surle
sol uni.
LaSalinas étaitépongée parson litde sable.
Levent soufflait danslaVallée,
soulevant poussièreetpaille, gagnant enforce eten âpreté comme ildescendait versle
Sud.
Ildesséchait lagorge, irritait lapeau etbrûlait lesyeux.
Leshommes auxchamps
portaient deslunettes etse protégeaient lenez parunmouchoir nouésouslesyeux.
Le
vent tombait lesoir.
La couche deterre végétale étaitépaisse aufond delaVallée, maiselles’amincissait sur
les contreforts.
Plusonmontait, pluselles’amenuisait, dénudantlaroche, pourn’être
plus, àla limite delagarrigue, qu’untapisdesilex quibrûlait lesyeux souslesoleil.
Jusqu’ici jen’ai parlé quedesannées fastesoùles pluies étaient abondantes.
Maisily
avait aussi lesannées sèches, terreurdelaVallée.
L’eausuivait uncycle étalésurtrente
ans : d’abord venaitcinqousix magnifiques annéeshumides avecdix-neuf àvingt-cinq
pouces d’eau ;c’étaitundébordement d’herbe.Puis,sixousept bonnes annéesavec
leurs douze àseize pouces ; ensuitec’étaient lesannées sèchesavecleurs maigres septà
huit pouces.
Laterre durcissait, lesplantes netrouvaient paslaforce depousser etla
pelade dénudait laVallée.
Leschênes vertssemblaient pétrifiésetl’armoise étaitgrise.
Le sol sefendillait, lesruisseaux tarissaient, lebétail mâchonnait desramilles sèches ;
les vaches maigrissaient etquelquefois crevaientdefaim.
Lesgens, s’ilsvoulaient boire,
devaient allerchercher leureaudans desbarriques.
Alorslesfermiers etles éleveurs
maudissaient leurVallée.
Desfamilles vendaient pourunebouchée depain ets’en
allaient.
C’étaitimmanquable : pendantlesannées sèches, lesgens oubliaient lesannées
prospères et,dès que lapluie revenait, ilsoubliaient lasécheresse.
Ilen était toujours
ainsi.
Telle étaitlalongue valléedelarivière Salinas.
Sonhistoire étaitcelle detout lepays.
Il
y avait d’abord eudes Indiens, maisd’une racedégénérée, sansénergie, incapables
d’inventer oudecultiver, senourrissant depucerons, desauterelles etde coquillages,
trop paresseux pourchasser oupêcher, mangeant cequi seprésentait, necultivant pas
et broyant desglands enguise defarine.
Leursguerres mêmesn’étaient quepitoyables
pantomimes.
Puis vinrent lesconquérants espagnols,gensdurs, voraces etréalistes.
Zélateurs
farouches etjoailliers experts,ilscollectèrent lesâmes etles pierres précieuses.
Ils
passèrent aucrible lesmonts etles vallées, ilsratissèrent leshorizons.
Certainsd’entre
eux s’établirent surdes terres grandes commedesroyaumes, donsderois d’Espagne
ignorant lavaleur ducadeau.
Ilsvécurent uneviedeféodaux pauvres.
Leurstroupeaux
paissaient enliberté etse multipliaient.
Périodiquement, lespropriétaires tuaientles
bêtes pourentirer lecuir desbottes etlesuif deschandelles etlaissaient laviande aux
vautours etaux coyotes.
Lorsqu’ils arrivèrent, lesEspagnols durentbaptiser toutcequ’ils voyaient.
C’estle.
»
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