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Après l'avoir engagée, avec force jurements, à ne plus faire aucun effort pour sortir ce soir-là, Sikes la laissa se remettre à oisir et vint retrouver le juif.

Publié le 15/12/2013

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Après l'avoir engagée, avec force jurements, à ne plus faire aucun effort pour sortir ce soir-là, Sikes la laissa se remettre à oisir et vint retrouver le juif. « Morbleu ! dit le brigand en essuyant la sueur qui ruisselait sur sa figure ; voilà une étrange fille ! - Vous ne vous trompez pas, Guillaume, répondit le juif d'un air soucieux ; vous ne vous trompez pas. - Pourquoi diable s'est-elle fourré dans la tête de sortir ce soir ? demanda Sikes ; qu'en pensez-vous ? Voyons, vous devez la connaître mieux que moi : qu'est-ce que cela signifie ?  Entêtement, je suppose, entêtement de femme, mon cher, répondit le juif en haussant les épaules.  C'est cela, je suppose, gronda Sikes. Je croyais l'avoir domptée, mais elle est aussi mauvaise que jamais. - Elle est pire, dit le juif avec son air soucieux. Je ne l'ai jamais vue dans un tel état, pour si peu de chose. - Ni moi non plus, dit Sikes ; je crois que c'est cette maudite fièvre qu'elle aura gagnée aussi, et qui ne veut pas sortir. Ça se pourrait bien, n'est-ce pas ? - C'est assez probable, répondit le juif. - Si cela lui reprend, dit Sikes, je lui ferai une petite saignée, sans déranger le médecin. » Le juif fit un signe de tête qui voulait dire qu'il approuvait ce mode de traitement. « Quand j'étais là, étendu sur le dos, elle était nuit et jour à mon chevet ; et vous, vieux loup que vous êtes, vous ne vous êtes pas montré une fois, dit Sikes. Nous avons été bien pauvres pendant tout ce temps-là, et je pense que c'est là ce qui ui a mis la tête à l'envers ; elle est restée si longtemps enfermée, qu'il n'est pas étonnant qu'elle veuille prendre l'air, ein ?  Sans doute, mon cher, répondit le juif à voix basse. Chut ! » omme il disait ces mots, la jeune fille reparut et alla s'asseoir à la même place qu'auparavant ; ses yeux étaient rouges et onflés. Elle se mit à se balancer, à secouer la tête, et, un instant après, elle partit d'un éclat de rire.  Allons, la voilà qui passe d'un extrême à l'autre ! » s'écria Sikes en regardant son compagnon d'un air extrêmement urpris. e juif lui fit signe de ne pas insister davantage, et au bout de quelques minutes, la jeune fille reprit sa contenance abituelle : après avoir dit tout bas à Sikes qu'il n'y avait pas pour elle de rechute à craindre, Fagin lui souhaita le bonsoir t prit son chapeau ; il s'arrêta sur le seuil de la porte, et regardant autour de lui, il demanda si personne ne voulait 'éclairer jusqu'au bas de l'escalier.  Éclaire-le, dit Sikes en bourrant sa pipe. Ce serait dommage qu'il se cassât le cou lui-même au lieu de donner aux mateurs de curiosités le plaisir de le voir pendre. » ancy suivit le vieillard jusqu'au bas de l'escalier, une chandelle à la main. Arrivés dans le passage, celui-ci mit un doigt ur ses lèvres, se rapprocha de la jeune fille et lui dit tout bas :  Qu'y a-t-il donc, Nancy, ma chère ?  Que voulez-vous dire ? répondit-elle sur le même ton.  La raison de tout ceci ? reprit Fagin ; s'il est si dur pour toi (en même temps il montrait de son doigt ridé le haut de 'escalier), car c'est une brute, Nancy, une bête brute... pourquoi ne pas...  Eh bien ! dit-elle comme Fagin se taisait, la bouche contre son oreille et les yeux fixés sur les siens.  Rien de plus pour le moment, dit le juif ; nous en reparlerons. Tu as en moi un ami, Nancy, un ami à toute épreuve ; j'ai n moyen tout prêt, un moyen sûr et sans danger ; si tu sens le besoin de te venger de ceux qui te traitent comme un hien... Comme un chien !... plus mal que son chien, car il est quelquefois de bonne humeur avec le sien ;... adresse-toi à oi... Je te le répète, adresse-toi à moi : il n'est pour toi qu'une connaissance d'hier, mais tu me connais de longue date, ancy. - Je vous connais bien, répondit la jeune fille sans manifester la moindre émotion. Bonsoir. » agin reprit le chemin de sa demeure, tout absorbé par les pensées qui s'agitaient dans son cerveau. Il avait conçu l'idée, on plus seulement d'après ce qui venait de se passer, bien que cela n'eût fait que l'y affermir, mais lentement et par egrés, que Nancy, fatiguée de la brutalité du brigand, s'était prise d'affection pour quelque nouvel ami ; le changement ui s'était produit dans son humeur, ses absences répétées, son indifférence pour les intérêts de la bande, pour lesquels lle montrait jadis tant de zèle, et de plus, son impatient désir de sortir ce soir-là à une heure déterminée, tout favorisait ette supposition, et même, aux yeux du juif du moins, la changeait en certitude. Ce n'était pas un de ses élèves qui était 'objet de ce nouveau caprice : quel qu'il fût, ce devait être une précieuse acquisition, surtout avec un auxiliaire de la rempe de Nancy, et il fallait absolument, pensait Fagin, se l'attacher sur-le-champ. ais il y avait à résoudre une autre question plus ardue. Sikes en savait trop long, et ses sarcasmes grossiers avaient fait u juif des blessures qui, pour être cachées, n'en étaient pas moins profondes. Nancy doit bien savoir, se disait Fagin, que i elle le quitte, elle ne sera jamais à l'abri de sa fureur ; son nouvel amant y passera, c'est chose sûre ; il sera estropié, eut-être tué : qu'y aurait-il d'étonnant, pour peu qu'on l'y poussât, à ce qu'elle consentit à empoisonner Sikes ? Il y a des emmes qui en ont fait autant, et qui ont même fait pis, en pareille occurrence. J'en aurais fini avec ce dangereux gredin, et homme que je hais ; un autre serait là pour le remplacer, et mon influence sur Nancy, avec la connaissance que 'aurais de son crime, serait irrésistible. es réflexions s'étaient fait jour dans l'esprit du juif pendant le peu de temps qu'il était resté seul dans la chambre du rigand ; tout plein de ces pensées, il avait saisi la première occasion de sonder les intentions de la jeune fille, et en la uittant, il lui avait glissé, comme nous l'avons vu, quelques mots à l'oreille. Elle n'en avait paru nullement surprise, et il tait impossible qu'elle n'en eût pas saisi la portée. Évidemment elle avait parfaitement compris de quoi il s'agissait : le oup d'oeil qu'elle avait lancé à Fagin en le quittant en était la preuve. ais peut-être hésiterait-elle à s'entendre avec lui pour faire périr Sikes, et c'était pourtant là le principal but à atteindre. omment pourrai-je accroître mon influence sur elle ? se disait le juif en regagnant sa demeure à pas de loup ; comment cquérir encore plus d'empire sur elle ? n esprit comme celui de Fagin était fécond en expédients : s'il pouvait, sans arracher directement un aveu à la jeune ille, la faire surveiller, et découvrir la cause de son changement, puis la menacer de tout révéler à Sikes dont elle avait si rand-peur, à moins qu'elle ne consentit à entrer dans ses vues, ne pourrait-il pas alors compter sur son obéissance ?  C'est sûr, dit Fagin, presque à haute voix. Elle n'oserait plus alors me refuser ; non, pour rien au monde ; l'affaire est onne, le moyen est tout trouvé et sera mis en oeuvre. Je te tiens, ma mignonne. » l jeta derrière lui un regard affreux, et fit un geste menaçant dans la direction de l'endroit où il avait laissé le brigand, puis ontinua son chemin, agitant ses mains osseuses dans les poches de sa vieille redingote, où il semblait à chaque ouvement de ses doigts crispés, qu'il écrasait un ennemi détesté.

« – Je vous connais bien,répondit lajeune fillesans manifester lamoindre émotion.

Bonsoir. » Fagin reprit lechemin desademeure, toutabsorbé parlespensées quis’agitaient danssoncerveau.

Ilavait conçu l’idée, non plus seulement d’aprèscequi venait desepasser, bienquecela n’eût faitque l’yaffermir, maislentement etpar degrés, queNancy, fatiguée delabrutalité dubrigand, s’étaitprised’affection pourquelque nouvelami ;lechangement qui s’était produit danssonhumeur, sesabsences répétées, sonindifférence pourlesintérêts delabande, pourlesquels elle montrait jadistantdezèle, etde plus, sonimpatient désirdesortir cesoir-là àune heure déterminée, toutfavorisait cette supposition, etmême, auxyeux dujuif dumoins, lachangeait encertitude.

Cen’était pasundeses élèves quiétait l’objet decenouveau caprice :quelqu’ilfût,cedevait êtreuneprécieuse acquisition, surtoutavecunauxiliaire dela trempe deNancy, etilfallait absolument, pensaitFagin,sel’attacher sur-le-champ. Mais ilyavait àrésoudre uneautre question plusardue.

Sikesensavait troplong, etses sarcasmes grossiersavaientfait au juif des blessures qui,pour êtrecachées, n’enétaient pasmoins profondes.

Nancydoitbien savoir, sedisait Fagin, que si elle lequitte, ellenesera jamais àl’abri desafureur ; sonnouvel amantypassera, c’estchose sûre ;ilsera estropié, peut-être tué :qu’yaurait-il d’étonnant, pourpeuqu’on l’ypoussât, àce qu’elle consentit àempoisonner Sikes ?Ilya des femmes quienont faitautant, etqui ont même faitpis, enpareille occurrence.

J’enaurais finiavec cedangereux gredin, cet homme quejehais ; unautre serait làpour leremplacer, etmon influence surNancy, aveclaconnaissance que j’aurais deson crime, seraitirrésistible. Ces réflexions s’étaientfaitjour dans l’esprit dujuif pendant lepeu detemps qu’ilétait resté seuldans lachambre du brigand ; toutplein deces pensées, ilavait saisilapremière occasiondesonder lesintentions delajeune fille,eten la quittant, illui avait glissé, comme nousl’avons vu,quelques motsàl’oreille.

Ellen’en avait parunullement surprise,etil était impossible qu’ellen’eneûtpas saisi laportée.

Évidemment elleavait parfaitement comprisdequoi ils’agissait : le coup d’œil qu’elle avaitlancé àFagin enlequittant enétait lapreuve. Mais peut-être hésiterait-elle às’entendre avecluipour fairepérir Sikes, etc’était pourtant làle principal butàatteindre. Comment pourrai-je accroîtremoninfluence surelle ? sedisait lejuif enregagnant sademeure àpas deloup ; comment acquérir encoreplusd’empire surelle ? Un esprit comme celuideFagin étaitfécond enexpédients : s’ilpouvait, sansarracher directement unaveu àla jeune fille, lafaire surveiller, etdécouvrir lacause deson changement, puislamenacer detout révéler àSikes dontelleavait si grand-peur, àmoins qu’elle neconsentit àentrer danssesvues, nepourrait-il pasalors compter surson obéissance ? « C’est sûr,ditFagin, presque àhaute voix.Ellen’oserait plusalors merefuser ; non,pour rienaumonde ; l’affaireest bonne, lemoyen esttout trouvé etsera misenœuvre.

Jete tiens, mamignonne. » Il jeta derrière luiun regard affreux, etfit un geste menaçant dansladirection del’endroit oùilavait laissé lebrigand, puis continua sonchemin, agitantsesmains osseuses danslespoches desavieille redingote, oùilsemblait àchaque mouvement deses doigts crispés, qu’ilécrasait unennemi détesté.. »

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