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André Béjin, De l'adolescence à la post-adolescence.

Publié le 30/03/2011

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Le sursis de la post-adolescence. Il est devenu bien difficile aujourd'hui de désigner des rites indiscutables d'entrée dans l'âge adulte. Qu'en est-il, tout d'abord, des rites que les adultes, dans le passé, contrôlaient assez étroitement ? L'obtention d'un diplôme d'études secondaires, voire supérieures, ne constitue assurément plus un rite d'accès à l'âge adulte, particulièrement dans une conjoncture de crise économique. Il semble d'ailleurs que pour lutter contre « l'échec et les inégalités scolaires « on tende à faire de ces diplômes de simples certificats de présence sur les bancs de tel ou tel lieu de « formation «. L'obtention d'un premier travail (et de son corollaire, le « premier salaire «) ne marque pas non plus, généralement, un véritable changement d'état, et ceci pour des raisons évidentes : instabilité professionnelle des jeunes, précarité des travaux qui leur sont confiés, etc. Le service militaire, dans les pays développés actuellement non engagés dans des guerres, a perdu également en grande partie sa fonction de rite d'initiation. Il n'entraîne plus de rupture nette dans la vie de l'appelé. Les contacts avec l'extérieur sont de plus en plus faciles. Dans certains cas, on peut acquérir pendant son service une formation professionnelle, la caserne faisant ainsi office de prolongement du système éducatif et de vestibule du marché du travail. Mais parmi les rites que les adultes supervisent moins directement ou qu'ils ne peuvent contrôler n'en est-il pas qui remplissent une fonction initiatique ? L'initiation sexuelle ne saurait être considérée aujourd'hui, dans nos sociétés, comme un rite de passage à l'âge adulte. Il en est de même, en général, pour le premier « véritable « amour, le premier « orgasme satisfaisant «, la première maladie vénérienne... Ils peuvent constituer des étapes importantes dans l'existence de nombreux individus mais ils ne marquent pas automatiquement l'entrée dans une autre vie comportant, à la fois, plus de droits et plus de responsabilités. Qu'en est-il, par contre, du mariage qui représentait probablement, dans l'ancienne société, l'un des rites les plus importants d'entrée dans la vie ? Il n'est plus aujourd'hui la manifestation évidente d'un « établissement «. Chez les jeunes des classes moyennes en particulier, il est de plus en plus souvent précédé d'une période de cohabitation censée offrir, à la fois, les avantages de la conjugalité et ceux de la non-conjugalité. Cette vie commune préalable amène à considérer le mariage comme une simple formalité. D'autre part, le recours plus facile et plus fréquent au divorce confère à l'union conjugale le caractère d'un mariage à l'essai à durée indéterminée. Le brouillage des limites se manifeste également en matière de patrimoine. La première moto, la première voiture ne signalent plus, en général, un véritable changement de statut.  

Et des jeunes se marient, qui sont loin d'avoir acquis des bases matérielles (travail, logement, etc.) très solides. Il est vrai qu'un grand nombre d'entre eux savent pouvoir compter sur l'aide de leurs parents ou de la société. Les attitudes vis-à-vis de la fécondité traduisent aussi une grande indécision. Quand devient-on « vraiment adulte « de ce point de vue? Les couples (particulièrement les non-mariés) retardent assez souvent la venue au monde de leur premier enfant et celui-ci est un peu considéré comme un enfant à l'essai dans une union à l'essai : sa présence ne modifie pas profondément les relations entre ses géniteurs ni leur mode de vie. Ce n'est peut-être qu'avec le deuxième ou le troisième enfant que les parents se voient contraints d'adopter des comportements plus responsables. Il apparaît donc que les événements qui pourraient tenir lieu de rites de passage ont subi, dans nos sociétés, une double altération. Ce sont de moins en moins des « épreuves «, risquées et probantes. D'autre part, s'est effacé, peu ou prou, leur caractère de cérémonies publiques (dans le cas du mariage notamment). Tout se passe comme si un besoin subsistait, cependant, de transitions risquées et cérémonielles. Attestent ce besoin les mouvements sociaux des dernières décennies dans les pays développés (mouvements qui apparaissent à bien des égards comme des simulacres de guerre) mais aussi la vogue actuelle des sectes et des sociétés secrètes en tout genre ainsi que la diffusion des drogues. Et révèle également ce besoin aujourd'hui le goût marqué pour l'aventure, la guerre, le fantastique... par procuration. Nos sociétés, en temps de paix, n'offrent donc pas de véritables rites d'entrée dans l'âge adulte. La plupart des individus passent insensiblement de l'adolescence à une apparente maturité en traversant un âge mal défini que l'on peut dénommer « post-adolescence «. Période consacrée aux « expériences « mais pendant laquelle on évite de prendre de graves « décisions «. Et souvent il faut avoir été frappé par quelque malheur — maladie, accident, mort d'êtres chers — pour se résoudre à quitter ce que Erik H. Erikson (*) a appelé le « moratoire (2) psychosocial « de l'adolescence prolongée. On se résigne alors, après une longue résistance, à laisser en friche certaines de ses potentialités pour assumer plus de responsabilités. André Béjin, De l'adolescence à la post-adolescence. Selon votre préférence, vous résumerez ce texte en respectant son mouvement ou vous l'analyserez en distinguant les thèmes qu'il comporte et, en montrant le lien qui existe entre eux de façon à mettre en évidence leur importance relative sans vous astreindre nécessairement à suivre le fil du développement. Vous inscrirez très nettement en tête de cette première partie de votre devoir le mot résumé ou analyse. Dans la seconde partie intitulée discussion vous dégagerez du texte un problème auquel vous attachez un intérêt particulier et dont vous préciserez les données. Vous discuterez ensuite le problème choisi et, vous exposerez, en les justifiant vos propres vues sur la question.   

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